Dans « Saison brune », Philippe Squarzoni nous livre un récit inédit, qui entremêle analyses scientifiques et interviews de spécialistes, considérations personnelles et hommage au cinéma, enquête politique et essai engagé. A découvrir aux éditions Delcourt. Rencontre avec Philippe Squarzoni...
Tu as dû amasser une somme impressionnante d’informations qu’il a fallu comprendre avant de les analyser. Tu t’attendais à une telle masse de travail en t’attaquant à ce projet ?
Au tout début, non. Lorsque j’ai commencé à travailler sur le réchauffement, il s’agissait simplement de compléter un des chapitres de Dol, mon précédent ouvrage politique, et d’évaluer l’action de la droite sur les questions d’environnement. Mais assez rapidement, en commençant à me documenter, j’ai réalisé à la fois la gravité du dérèglement climatique que nous avons enclenché, et l’ampleur des changements à effectuer pour éviter les conséquences les plus graves du réchauffement. Et je me suis rendu compte qu’il ne s’agissait pas de rajouter quelques pages à Dol, mais que cette préoccupation, qui m’empêchait désormais de dormir, allait constituer mon prochain livre.
As-tu été très surpris par les rencontres et les découvertes que tu as faites pendant la réalisation de ton ouvrage ?
Oui, en tout cas, j’ai énormément appris. J’ai toujours été sensible aux questions environnementales, mais sans pour autant m’y intéresser véritablement. C’est un peu comme pour d’autres choses, on a parfois des trous dans sa culture littéraire ou dans sa pensée politique. On peut être très amateur de cinéma, et n’avoir jamais vu un film de Fellini, par exemple. C’est mon cas. De la même façon, je ne m’étais jamais penché réellement sur les questions relatives à l’écologie. Et j’avais donc beaucoup à découvrir et à apprendre. Mais, d’une certaine façon, cette méconnaissance initiale était aussi un atout. Parce que sur certaines questions, comme le nucléaire notamment, ça m’a permis de lire un spectre d’auteurs relativement large avant de me faire une opinion. Au final, Saison brune est à la fois le récit des lectures et des rencontres que j’ai pu faire et le résultat de ce travail. C’est l’occasion d’ailleurs de redire ma dette envers ceux des scientifiques ou des journalistes qui ont écrit des livres sur ces questions, qui ont nourri ma réflexion et les pages de cet album, et de remercier encore une fois les personnes interviewées dans Saison brune qui m’ont fait confiance et consacré beaucoup de leur temps.
Tu as dû stopper tes recherches pour prendre le temps de dessiner tes pages. Combien de temps as-tu finalement passé sur le sujet ?
Au bout du compte, le projet s’est étalé sur six ans. Parce que la première difficulté à résoudre pour pouvoir faire ce livre était financière, et j’ai dû abandonner deux fois cet album pendant la phase de documentation. Mais pendant ces interruptions, le livre continuait à m’occuper l’esprit, et beaucoup de pages qui sont dans Saison brune ont été pensées dans ces moments-là. Puis, à partir du moment où les Éditions Delcourt m’ont permis de me lancer véritablement dans ce travail, je savais que j’avais à la fois du temps devant moi et une pagination potentiellement conséquente. J’ai finalement fait ce livre en trois ans et demi, dont les dix premiers mois ont été consacrés aux différentes lectures et aux interviews.
Comment considères-tu ton travail sur ce livre : s’agit-il d’une enquête sur le dérèglement climatique ou plutôt d’un essai politique ?
Comme Garduno à l’époque, et les tomes qui ont suivi, c’est un livre qui relève à la fois du documentaire, de l’autobiographie, de l’essai... Et ça n’est pas forcément facile de savoir comment les qualifier. C’est peut-être même encore plus difficile pour celui-ci. Parce que, de tous ces livres, Saison brune est à la fois celui qui développe le plus d’éléments scientifiques, mais c’est aussi probablement le plus personnel de tous. Celui où j’aborde des questions plus intimes, des inquiétudes sur le temps qui passe, la nostalgie...
FMA