Les éditions Nathan ont demandé à Francette Orsoni de choisir, pour leur « Collection de la mémoire du monde », treize récits de la tradition corse. Une re-création pour la plasticienne, conteuse, écrivaine à l’inlassable travail de recherche et de transmission.
Pour cette prestigieuse collection que les éditions Nathan ont relooké, ordonné par thèmes, pays ou régions, Francette Orsoni a sélectionné quelques histoires incontournables comme « A Spusata » ou « Le diable et Saint Martin » et d’autres beaucoup moins connues telles « Les jours prêtés » ou « Le Mal de tête, le Point de congestion et la Mort ». Thématiques de la pétrification, de l’invention du broccio, des enjeux qui ont opposé aux temps anciens bergers et cultivateurs, violentes sautes d’humeur du climat méditerranéen, legs des incursions sarrasines, l’éventail de ces contes et légendes est d’une grande diversité. Au fil des pages, l’illustration de la sagesse populaire corse croise un texte inspiré de l’historien latin Salluste, et l’image du jeune écervelé celle du forgeron rusé qui trompe ironiquement la mort. Le livre allie fraîcheur du ton et profondeur du contenu, tant le conte sait incarner la nature humaine et tant la légende se lit, s’incarne, s’interprète dans le paysage insulaire. Empli de vivacité, le rythme de l’écriture qui emprunte au parler sans tomber dans les stéréotypes langagiers. Agréable et poétique lecture. Contes cruels et/ou merveilleux. Légendes invitant à la rêverie, au retour aux sources de la tradition et de l’histoire d’une île complexe à la mémoire collective souvent tourmentée. Il y a trois ans Francette Orsoni avait publié, illustré par Véronique Joffre, un magnifique album, « Ninu et la Mère des vents » (éditions Syros). Beauté du mot et du graphisme. Un régal à lire aux enfants de 5/6 ans en prenant le temps d’énoncer ou de chantonner les couplets en corse qui sont autant de sésames pour faire entendre et comprendre la langue originelle de l’île. Transmettre a lingua materna, une préoccupation constante de la conteuse, qui a même imaginé une méthode d’apprentissage du corse pour les petits, « Capisci Bè », destinée aux écoliers, mais aussi aux enfants fréquentant les centres aérés. (Atelier réalisé avec le soutien du C.U.C.S de la ville d’Ajaccio) Michèle Acquaviva-Pache