Cet été, nous avons eu l’occasion d’assister à une conférence organisée par les dirigeants de la revue « Kallisté ». Ils exposaient les buts humanitaires et émouvants de leur magazine en faveur des enfants corses malades.
Ce nom de « Kallisté » est aimé par tous les
Corses. Il est flatteur pour leur pays et
correspond tellement à la réalité. Cette pensée
nous entraîne dans une réflexion sur les
premiers temps de l’île. Quels en furent les
premiers habitants ? « Kallisté » nous avait
conduits vers l’aube de notre histoire. Celleci
nous présentait ce millénaire d’avant notre
ère connu comme étant l’âge du fer. Ce furent
les Phéniciens qui, les premiers, avaient
transmis ce nom « Callista ». Mais était-ce bien
celui que lui donnaient ses premiers habitants ?
Les Phéniciens ouvrirent l’histoire, munis
de leur langue et de leur écriture alphabétique.
Mais cet alphabet correspondait-il aux sons
et à la prononciation de la langue des
autochtones, autrement dit de leur glosse ? Ce
nom nous vient des envahisseurs. Ils nous l’ont
donné en héritage. Mais ils n’ont pas été les
seuls à vouloir le transmettre. Et ces noms que
nous devons à tous les auteurs des invasions
successives de ces premiers temps n’ont fait
qu’ajouter à la confusion des uns et des
autres.
Bref, ces noms de l’île ne nous
renseignent pas sur ceux qui furent nos
premiers ancêtres. Il suffit de les énumérer pour
en juger. Hesiode (8e siècle A-C) les nomme
Tyrséniens sur lesquels régnèrent les fils
d’Ulysse et de Cyrcé. Si l’on en croit Ovide,
le premier nom de l’île fut « Terapne ».
Lycophreon , poète hellénique du troisième
siècle avant notre ère transmet celui de
« Cerneate » ». Mais Callimaque d’Alexandrie
à la même époque attribue à l’île celui de
« Tyr ». Les Grecs l’appelèrent « Kurnos »
(nom qui rappelle Cerneate mais qui montre
aussi la difficulté de comprendre la
prononciation autochtone) Les légendes s’y
mettent en même temps qu’elles indiquent la
culture des envahisseurs. Les traditions reprises
par les historiens corses Filippini et Pietro
Cirneo font de Kurnos le fils d’Herakles dont
l’île prit le nom. Cette légende nous a été léguée
par Denys d’Halicarnasse et par Diodore de
Sicile. Si l’on écoute Strabon, Corse viendrait
de « Corsus » fils d’Hercule. Isidore de
Séville pour sa part nous raconte l’histoire de
Corsa. Cette vachère ligurienne aurait découvert
l’île en suivant un taureau italique qui traversait
la mer à la nage, jusqu’à de riches pâturages.
Finalement les noms de Corsica et de Cirnu
( Cyrnos ou Kyrn) ont prévalu à travers
Romains et Grecs eux aussi envahisseurs.
Alors, pour parler de ceux qui peuplèrent la
Corse pendant la nuit des temps depuis le début
de la période quaternaire, puis la préhistoire
des âges de la pierre polie, du cuivre et du
bronze, des « stantari » et « stazzone » on a
finalement opté pour le nom de « Korsi » Il
est ainsi orthographié dans les textes français,
pour qu’on ne le confonde pas avec celui de
« Corsi » qui est celui des Corses d’aujourd’hui.
Mais rien n’éclaire pour le moment et sans
doute à jamais le vrai nom des autochtones
de cette île. C’est l’énigme des origines.
Marc’Aureliu Pietrasanta