Dans votre nouveau spectacle vous reprenez des chansons – souvent très célèbres – du répertoire espagnol ou sud américain. L’heure semble aux reprises actuellement ?
Des reprises il y en a toujours eu chez tous les artistes parce qu’il arrive un temps où on a envie de chanter autre chose que son répertoire. Mais je n’ai pas voulu des reprises pour des reprises, car il s’agit de réincarner une chanson. Et c’est dans cette réincarnation qu’intervient le travail d’acteur.
Ce choix de l’espagnol n’est-il pas un signe de détachement à l’égard de la langue corse ?
Pas du tout… J’aime toujours autant le corse. Mais je ne me sens pas présentement mener un combat comme je l’ai fait avec les « Nouvelles Polyphonies Corses » ! Sans toutefois regretter ce combat. De toute façon c’est avec mes tripes corses que je chante l’espagnol !
Qu’est-ce qui vous attire tout spécialement dans la langue de Lorca ou de Neruda ?
Sa musicalité que je ressens bien dans ma tête et dans ma bouche. Sa familiarité : c’est une cousine proche du corse. Sa chaleur… comme si elle m’appartenait. Comme si je l’avais parlé dans une vie antérieure.
Mais que vous apporte l’espagnol que ne vous offrent pas d’autres langues ?
En espagnol je libère des sentiments qui me viennent moins bien dans d’autres langues. Dans la poésie espagnole il y a toujours force et sensualité, même si s’expriment des choses irrémédiables. J’aime la manière dont les poètes hispanophones parlent de la vie, de l’amour, de la mort.
Comment avez-vous imaginé ce spectacle ?
Il fallait que je rende hommage à Mercedes Sosa qui est une inspiratrice pour moi et que j’écoute toujours avec émotion. Je voulais chanter du Lorca, du Neruda. J’avais envie d’un détour par l’univers d’Almodovar. J’avais à cœur d’interpréter des créations de Nilda Fernandez, qui est un ami, avec qui j’ai partagé des scènes et fait un spectacle. De chansons tristes je devais aller vers des rythmiques plus festives, plus jubilatoires. Si la liste des titres à chanter a été facile à dresser, en réduire le nombre n’a pas été évident. Quant au déroulement, à la progression du concert, ça c’est fait au feeling.
Un genre musical du domaine hispanique que vous n’auriez pu interpréter ?
Le flamenco… que j’adore pourtant ! Mais il ne m’appartient pas et n’est pas dans mes possibilités !
Cèccè Pesce à la guitare joue un rôle important dans votre spectacle. Comment se passe votre collaboration ?
Dès le début ça a été un vrai bonheur de travailler avec lui. A chaque répétition il me surprenait par ses dons, par son extraordinaire sensibilité. Non seulement il captait immédiatement ce que je désirais mais il faisait des propositions qui étaient vraiment pertinentes.
Ses improvisations pendant le concert c’est à votre demande ?
J’y tenais car chaque jour il faut que nous vivions quelque chose de différent. C’est pourquoi on ne doit ni jouer ni chanter constamment les titres prévus à l’identique. Ensemble on a une grande complicité On est en confiance.
Le plus dur à surmonter dans cette entreprise ?
L’organisation pratique et matérielle du spectacle. Heureusement que je suis aidée par un « noyau dur » d’amis, ainsi Laurent Damerval pour l’affiche et les photos, Élisabeth Chiari pour les relations avec la presse, Raoul Locatelli pour la sono, et que j’ai eu le soutien de RCFM.
« Gracias a la vida », chanson écrite par Violetta Para et chantée par Mercedes Sosa, un titre emblématique pour votre récital ?
Il résume bien ce que je sens. Il est envie de vivre, de chanter, de partager du beau, du bon, du vrai.
Propos recueillis par M.A-P