« On rit en se demandant s’il faut vraiment rire ou pleurer ou s’indigner en voyant ce qui se passe sur scène. Mais je crois que lorsqu’on commence à réfléchir à l’attitude et aux réparties des personnages, on a beaucoup moins envie de rire ! » Guy Cimino
Dans quel type de comique, de rire, rangez-vous « Ô Corse, île d’amour » ?
Un rire plutôt noir sans relever de l’humour noir … On rit en se demandant s’il faut vraiment rire ou pleurer ou s’indigner. Mais je crois que lorsqu’on commence à réfléchir à l’attitude et aux réparties des personnages on a beaucoup moins envie de rire !
Comment qualifier les personnages de la pièce ? De quelle manière avez-vous travaillé avec les acteurs ?
Ces personnages peuvent par instants être sympathiques et à d’autres très antipathiques. Les comédiens ont beaucoup apporté pour les construire. Certains en osant pousser presqu’à la caricature, comme Jean Louis Graziani qui interprète le psy. D’autres en étant toujours dans la nuance comme Namaria Filippi, qui joue la jeune fille, et qui est sans doute la figure la plus complexe de la pièce.
La distribution a-t-elle été de soi, ou avez-vous eu des hésitations ?
J’avais plusieurs possibilités à ma disposition. Les rôles de Corinne Mattei et de Marie Ange Geronimi étaient par exemple permutables. Personnellement j’aurais volontiers joué le père ou le boucher … Mais il fallait travailler vite et ne pas tergiverser. Heureusement pour moi, la troupe du Teatrinu je la connais bien. Alors je suis allé à l’efficacité.
Était-ce évident de confier au même comédien, Jean Pierre Giudicelli, le rôle de la grand-mère indigne et de l’Apollon des Sablettes ?
Au départ j’ai tout de suite vu Jean Pierre en Apollon de la plage. Pour la grand-mère je me posais des questions. Puis j’ai pensé à lui qui sait si bien imiter sa mère gérant ses affaires. Les deux personnages n’étant jamais sur scène ensemble j’ai fait un essai. Le résultat m’a plu. En fait cette grand-mère et ce bellâtre sont tous les deux mauvais. Le second a en prime la caractéristique d’être con !
Ces personnages de « Ô Corse, île d’amour » qui sont ceux de la vie ordinaire, quel est à vos yeux leur défaut le plus affligeant ?
Ils ressemblent à ceux du film « Affreux, bêtes et méchants ». Ce sont des égoïstes qui ne pensent qu’à eux et qui peuvent avoir d’horribles réactions.
Ont-ils quand même des qualités ?
Ils en ont sûrement … Le père peut être gentil avec sa fille. Au début le jeune gigolo est sincèrement épris du personnage incarné par Namaria Filippi. Puis son tempérament reprend le dessus car l’argent manque au jeune couple. Il choisit la facilité et veut renouer avec la « Tabatière » pour profiter des ses largesses malgré son âge mûr.
Dans toutes les sociétés pour des raisons de misère, de famine, de honte, de déshonneur dans le cas de filles-mères ou de femmes violées ou par cupidité il y a eu des infanticides. N’avez-vous pas redouté d’aborder ce sujet en Corse, pays (soit disant) de l’enfant roi ?
Dans la pièce d’Horvath il y a infanticide, il était donc logique qu’il en soit ainsi dans la version corse. Là, pour des raisons diverses tous, sauf la mère, veulent se débarrasser de ce bébé qui, les gêne. D’emblée il est condamné à mort. Il y a dans la pièce un côté sacrificiel un peu religieux, et l’exécuteur est la grand-mère, qui au fond est un ogre.
Propos recueillis par M.A-P