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Nouvel article

jeudi 1er mars 2012, par Journal de la Corse

210e anniversaire de la naissance de Victor Hugo, à Besançon le 22 février 1802 et bientôt le 150e anniversaire des « Misérables ». L’auteur, figure emblématique du XIXe siècle et de son histoire. Son œuvre : le livre culte du peuple et de son roman.

Fils de Léopold Hugo, général d’Empire, son « père ce héros au sourire si doux ». Sa mère Sophie Trébuchet. Victor, le dernier des trois enfants du couple, Abel, l’aîné, plus âgé de 4 ans et Eugène, de 2 ans. Tout ceci n’est pas étranger à la Corse. Une plaque, sur un immeuble près de l’église Sainte Marie à Bastia y indique le séjour du poète lorsqu’il était bébé. En effet il arriva avec son père en Corse au mois de janvier 1803 avec une gouvernante et ses deux frères. Sa mère était demeurée à Paris afin d’y régler certaines affaires auprès de Joseph Bonaparte. Sophie Trébuchet ne séjourna par la suite qu’un mois à Bastia. Le ménage n’allait pas bien. Après 1814 le général n’entretenait plus aucune relation avec sa femme. Il semble bien que les torts n’étaient pas seulement de son côté dans cette rupture. Madame Hugo mourut le 27 juin 1821. Cette mort du « démon » comme l’appelait le général libérait celui-ci. Le 20 juillet 1821 il épousait en secondes noces à Chabris dans l’Indre « Madame Thomas y Sactoin, âgée de 37 ans, veuve du Sieur Anaclet d’Almet, propriétaire. » tandis que la lettre de faire part faisait état de « Mme Veuve d’Almet, comtesse de Salcano. » Après 18 ans de concubinage, Marie-Catherine Thomas était devenue l’épouse du général Léopold Hugo. Il apparaît que ce père fut méconnu par le fils durant une vingtaine d’années. Dans une lettre adressée à son père après son remariage, Victor Hugo disait qu’il n’avait aucune prévention contre sa nouvelle conjointe n’ayant pas eu l’honneur de la connaître. » Le père et le fils entretinrent ensuite des rapports très affectueux et même littéraires. Marie-Catherine avait été la gouvernante des enfants pendant le séjour bastiais. Le futur grand poète n’avait pu cependant pas en garder des souvenirs précis vu son âge. En fait il s’agissait d’une femme de Cervione, fille de Nicolas Thomas et d’Anne-Marie Saetoni. Elle n’était pas à l’origine de la rupture de Léopold et de Sophie. Fut-elle la modèle de la Gunhamara des Burgraves ? Celle-ci symbolise la vengeance dans ce mélodrame eschylien. Plus probablement, au moment où « Les Burgraves » tiennent la scène, la Corse suscite beaucoup d’intérêt dans le public littéraire. En 1835, le frère aîné de Victor, Abel Hugo, publie une « Description de la Corse » très documentée. Il y présente l’île et ses habitants avec beaucoup de sympathie. Et note que le Corse « ne suspend sa vengeance que pour mieux en assurer l’effet. » Mérimée vient de publier sa « Colomba », véritable Electre de la « vendetta ». Et voilà Gunhamara qui rappelle : « Oui mon nom est charmant en Corse, Ginevra. » Elle jure de venger le meurtre de son amant survenu lorsqu’elle était jeune « par la Corse au ciel d’or au soleil dévorant » et déclare « Eh bien, je suis le meurtre et je suis la vengeance/Je suis la soif de sang. » On peut croire que Victor Hugo a pu prendre ce dernier terme dans un des plus vieux voceri de Corse datant du XVIIIe siècle : « Benchè abandunata e sola/Vogliu vendicà lu sangue ! » (Quoique seule et abandonnée, je veux venger le sang). Ces chants du deuil et de la vengeance étaient alors publiés et connus. Par la suite, dans ses dernières années, Victor Hugo eut des rapports d’amitié très suivis avec Louis Blanc, l’autre enfant d’Ajaccio. Il fit lire son éloge funèbre qui se terminait ainsi : « Les êtres comme Louis Blanc sont des consciences suprêmes. Ils traversent la vie et n’ont qu’une préoccupation, faire le double devoir : devant l’histoire, les faits, les incidents, les catastrophes, les événements, les révolutions, servir les peuples, devant Dieu les aimer. » Tels furent les rapports directs de Victor Hugo avec la Corse, bouclant la boucle avec elle du début à la fin de sa vie. L’immense artiste repose désormais au Panthéon où une marée humaine l’accompagna derrière le corbillard de ces pauvres qu’il avait tant aimés.

Marc’Aureliu Pietrasanta

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