Superbe concert de Danyel Waro et de A Filetta
La Réunion et la Corse. Une merveilleuse rencontre. Un superbe rendez-vous entre le maloya de Danyel Waro et la polyphonie de A Filetta.
Soirée inédite avec ses moments rares et précieux que celle offerte par cette affiche des Musicales partagées entre Waro et A Filetta aux expressions artistiques si différentes qu’on avait peine à les imaginer réunies … Et pourtant la réussite était là et le mélange vocal éclatant. Si convaincante l’initiative qu’elle s’imposait comme naturel. Comme évidente. Magie des voix et des instruments. Legs de la lutte des esclaves contre le pouvoir colonial et blanc le maloya est hymne à la libération. Il est « chanter vrai ». Il est pureté de « batarsité » ce mot forgé par Waro et qui va tel un gant à son île de l’Océan indien où des peuples de toutes couleurs, de toutes origines se sont retrouvés pour se fondre en cette « batarsitude » complexe et dépouillée d’angélisme car traversée de contradictions flagrantes. Anticonformiste et hors norme Danyel Waro qui se met régulièrement en retrait dans son village pour s’épargner d’être pris dans un engrenage qui pousse sans cesse à courir après le temps et à se laisser dévorer dans cette course. Homme libre, « Danyel chante ce qu’il est et est ce qu’il chante », dit Jean Claude Acquaviva qui a travaillé avec lui en résidence à la Réunion. Aucun hiatus entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Aussi charismatique que fantasque « le pape du maloya » ainsi qu’on le surnomme, est un ardent défenseur de la langue créole dans laquelle il célèbre des nuits bleues de mots. Entouré d’instruments traditionnels singuliers Danyel Waro fait une musique totale aux rythmes tour à tour rugueux, fervents, âpres, chatoyants. Au partage de l’intense, fertile et fragile émotion et de la puissance du souffle A Filetta a répondu activement présent … Et l’on s’est évadé dans une autre dimension, celle surgie de la création avec ses instants fusionnels. Aux appels du maloya sur la scène bastiaise les réponses de la polyphonie. Subjuguant chjami è rispondi. A ne pas rater le double album de Danyel Waro sorti en 2010, l’année où il a reçu, à Copenhague, le prix Womex décerné par les professionnels des musiques du monde, signe d’une audience internationale grandissante.
Michèle Acquaviva-Pache