De «  Pesciu Anguilla  » à «  Pépé l’Anguille  » Enfin une traduction en français ! Comment n’a-t-on pas pensé plus tôt à traduire «  Pesciu Anguilla  » de Sebastianu Dalzeto, premier roman en langue corse paru en 1930 ?.. Une omission réparée avec bonheur par François Michel Durazzo. Pesciu Anguilla est devenu Pépé l’Anguille, mais c’est toujours le même gamin, vif argent, qui se faufile entre les mauvais coups. Toujours le même môme qui échappe à ceux qui prétendent lui apprendre à vivre en le rudoyant. Toujours le même gosse gouailleur ou taiseux, cousin du Kid de Chaplin ou de l’Oliver Twist de Dickens, qui court un Bastia de misère – celui des pauvres de la fin du XIXème siècle. Pépé l’Anguille est bien Pesciu Anguilla. En le suivant de déambulations en péripéties, d’un naufrage en un sauvetage on s’amuse. On s’émeut. On se prend à habiter ce Pontetto, quartier déglingué où vit le petit. Fraîcheur et saveur d’un récit pétri de respect humain et de drôlerie. Pas de pittoresque clinquant. Pas de calques tarabiscotés de jeux de mots d’une langue à l’autre, mais une fluidité de l’expression. Au fil des pages on ne peut qu’être frappé par la complexité du monde de Dalzeto, par sa critique sociale alliée à sa verve. François Michel Durazzo a à son actif de multiples traductions de l’espagnol, du catalan, du corse, l’italien, langues qu’il pratique au quotidien, auxquels il faut ajouter le turc, l’arabe, l’hébreu, le portugais qui lui sont un peu moins familiers, précise-t-il ! Les textes, il les traduit d’abord à la vitesse où il les lit. Puis c’est une relecture et un peaufinage de ce premier jet. Parvenu à une version qu’il juge acceptable il entreprend alors une comparaison avec l’original. «  Pesciu Anguilla  », le traducteur, qui enseigne le latin et le grec en classes préparatoires, l’a découvert au hasard d’une promenade à Florence chez un bouquiniste. C’était il y a une vingtaine d’années. Corse né sur le continent, passant toutes ses vacances sur l’île, il n’avait pas eu l’occasion de lire l’œuvre de Dalzeto. Une fois le roman, «  Pesciu Anguilla  », commencé il ne le lâcha plus. Conquis à jamais ! S’il a été élevé à l’extérieur et s’il travaille à Bordeaux François Michel Durazzo a constamment entretenu un contact étroit et fertile avec la langue corse, qui est sa matrice, son terreau originel. Poète, son cheval de bataille en tant que traducteur est de faire connaitre la littérature corse au dehors. Pari réussi avec «  Pépé l’Anguille  ». Michèle Acquaviva-Pache Repères Sebastianu Dalzetu est né en 1875 et mort en 1963. Journaliste de gauche il a une Å“uvre poétique et romanesque en corse et en français. Sa biographie mériterait amplement des recherches et des études poussées. La traduction de son roman est éditée par «  Fédérop  », qui développe une ligne éditoriale axée sur la littérature du sud, où la Corse à donc sa place. FM Durazzo a traduit de très nombreux auteurs de langues latines, en particulier de l’espagnol d’Amérique du Sud, dont l’Argentin, Ricardo Piglia, pour notamment «  La ville absente  » et «  l’Argent brà »lé  » ou le Mexicain,David Toscana, pour «  El utimo lector  » et «  Tula  ». Des ouvrages parus chez «  Zulma  ». Â