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Les vingt ans d’une galerie

jeudi 28 juillet 2011, par Journal de la Corse

Pour le 20ème anniversaire de sa galerie dans les vignes, Henri Orenga de Gaffory invite deux artistes majeurs qui avaient inauguré le lieu d’exposition : Jean Paul Pancrazi et Bernard Filippi.

Ils sont tous deux peintres mais leurs expressions respectives sont diamétralement opposées. Ils sont aussi amis depuis plus de quarante ans mais leurs démarches sont carrément différentes voire divergentes. C’est dire si leurs expositions jumelles offrent un sacré contraste ! Sobriété, on ne peut plus épurée chez l’un, Pancrazi. Luxuriance – au moins en apparence – de l’autre, Filippi (1). Jean Paul Pancrazi a très tôt rejeté le dessein. Au trait il préfère la trace, l’empreinte laissée par un objet, que ce soit par exemple le parpaing ou le tampon. Sa peinture est jetée, et exclut la gestuelle, privilégiant le geste sans emphase et humble de l’ouvrier, geste condensé en sa plus stricte utilité. Dans ses toiles la matière terre toujours. La terre originelle. Celle d’un commencement du monde. Celle que souille aussi l’usure de générations de vivants. Celle qui ne se dérobe donc pas devant la salissure ou les mélanges avec des matériaux communs et fort usuels. La terre comme en d’étranges fragments d’éternité. La terre fragile et inébranlable à la fois. La terre c’est encore chez Pancrazi le jaune possible. L’une des rares couleurs qu’il emploie avec le bleu outremer qui lui est si cher. Avec le rouge franc. Avec le noir. Avec le blanc. La grande économie de moyens du peintre n’aboutit plus cependant à l’austérité qui a hanté ses toiles pendant un moment. Voilà qui relève d’un constat qui se dispense de commentaires ! La présence récurrente de l’écrit dans le travail du plasticien ajoute du sens au sens, de la résonance à la résonance que l’écrit soit réduit à un vague mot ou à l’esquisse de lettres. L’écrit intrigue, questionne, et développe une musique mariée à la terre, vibrant avec la couleur. L’écrit court sur les reliefs de la toile tel un vent puissant ou telle une subtile respiration. Quant aux intitulés des tableaux ils sont d’autant plus frappants qu’ils surgissent fréquemment en contrepoint d’une certaine gravité des œuvres. Titres d’une fertile ambigüité …

Michèle Acquaviva-Pache

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