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LE JDC A L’OPÉRA DE LYON

jeudi 16 février 2012, par Journal de la Corse

Dimanche 5 février 2012 : l’Opéra de Lyon affiche ce jour-là deux opéras en un acte, « Santa Susanna » de Paul Hindemith et « Suor Angelica » de Puccini. La musique allemande de l’entre-deux-guerres est caractérisée par une violente réaction anti romantique, dans un pays durement marqué par la défaite, la crise et l’inflation. L’insolence, l’amertume, un cynisme corrosif, tels sont les mobiles psychologiques de cette musique. Hindemith est le principal représentant de cette tendance. La partition de Santa Susanna en témoigne ainsi que l’argument où se mêlent un expressionnisme d’une grande intensité, une audace complaisante et un érotisme d’une force impétueuse. On assiste donc à cette œuvre d’abord. La mise en scène de John Fulljames est sobre mais parlante, vécue par les interprètes dans les décors suggestifs de Johan Engels. La direction musicale, confiée à Bernhard Kontarrsky est précise et objective. Agnès Selma Weiland en Susanna et Magdalena Anna Hofmann en Klementia rivalisent de talent : voix sûres et elles aussi capables d’une grande intensité de l‘expression. L’orchestre de l’Opéra de Lyon sert de façon adéquate la personnalité très forte du compositeur. La deuxième partie du spectacle était donc impartie à « Suor Angelica » de Puccini. Comme le suggère Piotr Kaminski (1), l’ouvrage mérite mieux que la réputation de bluette clerico-sentimentale qui lui fut faite. Puccini s’y révèle là encore un maître de l’architecture dramatique. Aux couleurs sombres et fatalistes de l’ouvrage d’Hindemith répond ici la blancheur d’un orchestre diaphane et la stylisation religieuse. L’air central d’Angelica, qui vient après la nouvelle horrible qui lui apprend, de la bouche de la sévère Tante Princesse, que son enfant est mort, est un des plus beaux jamais sorti de la plume du compositeur ; Qui donc peut rester insensible, sinon les pédants, à cet opéra du salut et de la miséricorde ? Décors et mise en scène conformes au sujet et très esthétiques. Belle surprise en ces temps voués au « n’importe quoi ».Des distributions fort honorables. Csilla Boross en Suor Angelica n’a pas manqué d’émouvoir son public. Natascha Petrinsky dans le rôle de la Tante Princesse est distante à souhait. Au pupitre, Gaetano d‘Espinosa a obtenu excellemment tout ce que ce drame contient de compatissant.

Vincent Azamberti

(1) Mille et un opéras . Fayard. 2003

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