La nouveauté est pour le moins remarquée dans le monde de la BD. Tout d’abord parce que jamais jusqu’ici, des auteurs de bande dessinée ne s’étaient attaqués au « Horla » de Maupassant, oeuvre incontournable et magistrale de la littérature française du XIXe siècle. Du fantastique à la folie, il n’y a qu’un pas... Mais aussi parce que cet album, réalisé par Frédéric Bertocchini et Eric Puech, est le premier d’un nouveau label national : les éditions du Quinquet.
L’album a été présenté vendredi dernier à Ajaccio, en présence de nombreuses institutions et invités de marque, comme Michel Barat, le recteur de l’Académie de Corse, des représentants de la mairie d’Ajaccio, du Conseil Général de la Corse-du-Sud, ou encore de la Chambre de Commerce 2A. Il faut dire que l’adaptation a été réalisée par Frédéric Bertocchini, le régional de l’étape, que l’on connaît bien sur notre île pour ses séries liées à la Corse (« Paoli », « Le Bagne de la Honte », « Histoires corses », « Colomba », etc...). Mais le scénariste s’ouvre peu à peu les voies de la grande édition, après un biopic sur Jim Morrison l’année dernière, publié dans sept pays et quatre langues, et donc « Le Horla » aujourd’hui, aux éditions du Quinquet. A ses cotés, Eric Puech, considéré comme un « vieux de la vieille » dans le monde de la BD. Ce bédéiste averti, à la fois dessinateur et coloriste, a notamment fait les beaux jours de L’ »Echos des Savanes » il fut un temps, ou encore des éditions Albin Michel, aux cotés notamment de Bernard Werber, écrivain à succès et scénariste connu et reconnu. Avec « Le Horla », les auteurs s’attaquent à un véritable monument de la littérature française. « La difficulté scénaristique était de donner de l’épaisseur et de la consistance à une histoire, qui dans sa monture originale, est dénuée d’action » explique le scénariste. Il faut dire que Maupassant a écrit Le Horla à la première personne, et qu’il s’agit d’un journal intime. « Pour ce faire, et pour donner du rythme à la bande dessinée, l’astuce a été de donner de la chaire aux personnages secondaires, à peine effleurés et esquissés par Maupassant. Dans notre BD, ce sont ces personnages qui font l’histoire. Ce sont eux qui assistent, impuissants, à la descente aux enfers de Maupassant » explique Frédéric Bertocchini. Coté graphisme, le lecteur en prend plein les yeux. Et c’est rien de le dire. Eric Puech a travaillé directement en « couleurs directes ». C’est-à-dire que le dessinateur a travaillé à l’ancienne, en plaçant directement ses couleurs et ses peintures, à même le papier et directement sur les planches crayonnées... « Pas d’encrage, pas de colorisation informatique, j’ai travaillé comme un peintre avec ce soucis permanent d’être, graphiquement, dans la France de la seconde moitié du 19ème siècle ». Eric Puech nous livre ainsi un album grandement inspiré des influences impressionnistes. Du grand art ! Le découpage est quant à lui original, accompagné d’un parti pris narratif cohérent et parfaitement maîtrisé. Le premier album des éditions du Quinquet devrait connaître un accueil très chaleureux dans toute la France, surtout lorsque l’on sait que « Le Horla » de Maupassant se trouve au programme de 4e au collège.
E.C.