Des rives de la Méditerranée aux neiges de Savoie
Un beau spectacle ! On ne peut qu’être heureux quand sa vie ne se limite pas à l’éphémère, mais qu’il poursuit sa route en toujours se peaufinant. Ainsi en est-il de « La voix humaine » donnée en prologue à Olmi-Cappella, puis à « La Fabrique de Théâtre » à Bastia et au CCU de Corte, et qui met cap au sud avec étapes à « Locu Teatrale » d’Ajaccio et au centre culturel de Porto Vecchio avant de voguer sur Saint Florent.
Montée, jouée, chantée par Patrizia Poli et Lionel Damei (photo) cette œuvre très célèbre de Cocteau a également accosté à Istanbul, à Izmir, et à Madrid pour s’apprêter en février à arpenter les neiges de Savoie. « La voix humaine » s’est exportée ce qui n’est pas si fréquent pour du théâtre élaboré en Corse. La raison ? Sans conteste la qualité, la force d’inventivité, l’intensité de la sensibilité déployée avec une extrême justesse par ce spectacle. Le texte de Cocteau dit la déchirure d’une rupture qui finit en dévastation totale. Violence du cri. Rage de la trahison. Révolte absolue déclenchée par un malheur tout aussi absolu. Séparation conclue sur un ultime et poignant échange téléphonique. Désespoir. Solitude … Mince argument, pourrait-on soupirer, mais quelle virtuosité du mot sous la plume de Cocteau ! Quelle somptuosité de la langue ! Simplicité apparente d’une pièce en fait très complexe et qui sait se révéler dans sa densité de souffrance. Double originalité de cette « Voix humaine » portée à la scène par Lionel Damei : le monologue initial est devenu dialogue par l’association des deux interprètes (Poli, Damei). Dialogue du féminin et du masculin. Partition conjuguée d’une femme et d’un homme en illustration du propos universel de l’auteur. Autre trouvaille : des chansons – standards mondialement connus – sont parties intégrantes du spectacle. Elles résonnent comme autant de respirations offertes au spectateur. Comme autant de ponctuations aux accents dramatiques ou lumineux.
Michèle Acquaviva-Pache