Danièle Maoudj, universitaire, essayiste et enseignante à l’université de Corse, ne se livre pas à un exercice poétique. Ce recueil n’est pas une jolie façon de s’exprimer, c’est une autre façon de crier contre les déraisons qui nous font oublier nos identités, qui nous font tomber dans les jalousies, les perversions de l’âme, les actes barbares… tout ce qui nous éloigne de notre soleil. Une façon de tisser un fil pour ne pas tomber dans le ravin et l’obscurité, de maintenir un lien.
Brassage culturel
Le recueil de Danièle Maoudj s’ouvre sur un extrait d’une poésie de Khalil Gibran, poète libanais, dans lequel une femme tenant un enfant dans ses bras interroge « le Prophète ». Cette citation n’est doublement pas anodine. Premièrement parce qu’elle fait référence à un homme de lettres qui mêle dans ses écrits Orient et Occident, de la même manière que Danièle Maoudj construit des ponts sur les rives de la Méditerranée pour rassembler ses racines en un même canevas littéraire. Car Danièle Maoudj est une femme des deux rives, de père kabyle et de mère corse, qui exprime notamment son « brassage culturel » dans la poésie. Deuxièmement parce que les sages réponses du Prophète font écho aux absurdités des humains, qui ne pensent pas toujours aux conséquences de leurs actes, ni à l’avenir qu’ils tissent pour leurs enfants, ces héros du futur. Pour ne pas tout précipiter dans le vide, et rester… au bord du ravin. Daniel Maoudj appelle à la raison.
Quête identitaire
Quatre chapitres qui donnent le ton : « la lune avance sans hésiter », « les yeux du soupir », « le soleil rançonné », « A qui appartiens-tu ? ». A cette dernière question, Danièle Maoudj ne plaque pas une réponse attendue. Elle qui est assurément méditerranéenne, métisse insoumise, et femme avant tout, ne peut se résoudre à trancher cette question identitaire, « l’obscurité des bandeaux de l’identité, portes closes de l’avenir ». En quelques mots, elle désigne sans nommer. Comme dans son précédent recueil Rives en chamade, Daniel Maoudj se nourrit de la vie, de la mort, de l’espoir, de l’amour, de la famille, du granit, de la quête de l’identité, du soleil et se positionne contre la violence, sous toutes ses formes.
Myriam Mattei
Danièle Maoudj, Le Soleil est au bord du ravin, Colonna Édition, 80 pages, 7 €