La Grande Bellezza :
La déclaration de Sorrentino
Dans sa dernière oeuvre particulièrement réussie, Paolo Sorrentino fait une véritable déclaration à la ville de Rome. La Grande Bellezza consacre l’acteur italien Toni Servillo qui démontre une fois de plus la subtilité son jeu fabuleux.
En préambule de son oeuvre, Sorrentino emprunte à Céline ces quelques mots issus du début de Voyage au bout de la nuit : « Voyager, c’est bien utile, ça fait travailler l’imagination. Tout le reste n’est que déceptions et fatigues. Notre voyage à nous est entièrement imaginaire. Voilà sa force. » Cette citation correspond parfaitement à l’oeuvre sublime que le réalisateur italien nous livre avec grâce et instrospection. L’Italie, il l’aime, la connaît et la parcourt de film en film. Dès qu’il aborde son sujet, Paolo Sorrentino révèle son sens de l’esthétique et l’on se délecte de cette "grande beauté". La grande bellezza, justement, c’est la vie mondaine et légère d’un homme fatigué de papillonner entre conquêtes d’une nuit et soirées assommantes tant elles sont superficielles. C’est l’histoire d’un être nonchalant qui, le temps passant, fait défiler sa vie pour n’en tirer qu’un amer constat : il est seul. Cet homme, c’est le sémillant Toni Servillo, acteur de théâtre surdoué et bien trop rare sur nos écrans qui avait interprété le non moins sémillant (!) (sept fois président du conseil italien) Giulio Andreotti dans "Il Divo". Ici, point de politique mais une déclaration à la ville de Rome, à la beauté de l’art qui reste immuable et rassurante face à la vieillesse. Sorrentino met en scène un écrivain désabusé, Jep Gambardella, un dandy volage et amateur de belles femmes, de peintures mais il réussit surtout à magnifier la solitude humaine. Ce film se regarde comme une oeuvre d’art, le scénario est léger, certes, mais cela était nécessaire car ici, la beauté est silencieuse.
Garance Colbert