C’est Orson Wells qui n’hésita pas à écrire : « Les vrais génies du XXe siècle ne sont pas des cinéastes, des peintres, des savants ou des écrivains, ce sont des musiciens de jazz ». Affirmation outrée ? Ce n’est pas si sûr. Quand on se penche sur l’histoire du peuple noir, on ne peut s’étonner, même s’il est loin d’avoir été incapable de posséder la clef d’un art assuré (1), il faut se convaincre que, créateur du jazz, il s’est imposé comme ayant fourni à l’humanité une forme d’art qui n’existait pas et qui s’impose depuis plus d’un siècle, comme faisant partie des révélations esthétiques dont l’homme, au fil du temps, a su garantir l’éclosion . Aussi nous faut-il compter les meilleurs jazzmen comme des artistes d’envergure. Glenn Miller en fut un exemple probant. Tromboniste, chef d’orchestre, compositeur et arrangeur américain (1904-1944), après divers engagements de jeunesse, on le trouva vite aux côtés de Red Nichols, Benny Goodman et les frères Dorsey. Au printemps 1935, il enregistre pour la première fois sous son nom et signe des partitions pour des confrères destinées à la radio. Trois ans après, il accède à la célébrité grâce à une bonne promotion radiophonique et à des offres de qualité. En septembre il s’engage dans l’Air Force. Devant se produire à l’Olympia, dans Paris libéré, il prend le 15 décembre 1944 un petit avion qui n’arrivera jamais, disparaissant au dessus de la Manche. Le fameux « son Glenn Miller » qui s’appuyait sur l’idée de faire doubler le premier ténor sur la clarinette, reste l’un des plus remarquables de la « Swing Era » et certainement celui qui suscite le plus de nostalgie. (Dictionnaire du jazz. Laffont 2004 ed.) Glenn Miller a eu le mérite de créer une musique débordant les catégories bien définies. Les années n’ont pas réussi à en émousser la fraîcheur. Un enregistrement à retenir dans la collection « 100 ans de jazz » et réservé à Miller peut toujours se trouver dans des commerces discographiques (2). Deux CD le composent, comptant parmi les œuvres retenues, des pièces telles que « In the Mood », « Moonlight serenade », « Star dust », « Victory Polka », « Over there », « My ideal », etc….Les grandes figures du jazz, comme disait Charlie Parker, surent inventer un art nouveau qui ne cesse depuis sa naissance de se renouveler et d’éloigner ses horizons.
Vincent Azamberti
(1) On peut s’en assurer au Musée des arts premiers à Paris.
(2) RCA Victor LC00316