Il en est de certains vins qu’il est indiqué de ne point boire avant quelques mois, voire quelques années. Même si en matière de musique on a apprécié telle ou telle œuvre à son exécution première ou à son apparition sur le marché du disque, il arrive que passé un certain temps durant lequel on l’entendait moins, on la redécouvre avec plaisir. Dans l’histoire de la musique, on a longtemps négligé des compositeurs aujourd’hui de grand renom jusque à ce qu’on les redécouvre. Dans l’histoire du jazz, un Lester Young fit une carrière éblouissante. Sans qu’on l’oubliât jamais il est vrai, le jazz ne cessa d’évoluer en d’autres voies que la sienne, mais son succès perdure, au delà de ce qui vint après lui. Il reste unique dans la maîtrise de la décontraction où il s’oppose à la frénésie et à la transe. Une référence possible : l’album « Lester Young, Countless » repris par le label Emancy proposant des pièces créées entre 1938 et 1944, avec un Lester au mieux de sa forme, témoin de la quintessence du jazz de Kansas City (1). Cet enregistrement compte 22 pièces dont « Way down yonder in New Orléans », « Countless blues », « Them There Eyes », « I want a little Girl », etc…Un témoignage sûr et envoûtant. Lester Young était saxophoniste, clarinettiste et compositeur américain (1909-1959). Il enregistra abondamment mais il faut compter surtout sur ses nombreuses tournées aux USA et en Europe. Son style diffère radicalement de celui de l’école des ténors des années 30, représentée par Colema Hawkins que l’on croyait incontournable. Les musiciens de cette école cultivaient un son riche, chaleureux et puissant. Lester Young alla dans une direction opposée (Son détimbré et vibrato discret). (2) L’apport de Lester est capital. « C’est le père du jazz des années 50, l’inspirateur du style cool », osent écrire les auteurs du Dictionnaire du jazz (Laffont 1994). Il a laissé quelques trop rares interventions à la clarinette. Lester Young décéda en 1959, victime, comme trop de jazzmen hélas, d’une crise cardiaque liée à des abus d alcool.
Vincent Azamberti
(1) 982 7423 (2) le son timbré est celui qui résonne bien. Le vibrato est la répétition serrée d’une même note.