Festivités estivales en Corse. Villes et villages rivalisent de spectacles. A la fois industrie touristique et divertissement. Fini les « sea, sex and sun » de Gainsbourg et des générations d’hier. L’heure est aux arts des Muses. On visite les musées en grappes humaines. On assiste aux concerts et pièces de théâtre. L’art lyrique et ses « fans », ses ténors et ses sopranos dans chaque coin. Réjouissons-nous. Dans tous les sens du terme. La mode se répand de plus en plus des défilés, cavalcades et cortèges en costume d’époque. Relève de la garde napoléonienne. Arrivée du gouverneur génois. Drapeaux, trompettes et grosse caisse. L’heure est de plus en plus à l’histoire et au passé revu et corrigé. Mais ne boudons pas notre plaisir. Tant mieux pour l’extension populaire de la culture et de la joie par ces parades multicolores. Cette année, les fêtes de Bastelica ont été particulièrement réussies. Sampiero, une des figures du Panthéon de la Corse avec Pascal Paoli et Napoléon. Célèbre dans toute l’Europe et la Méditerranée. Une stature de condottiere, stratège militaire de grand talent, brave parmi les braves, combattant indomptable, entraîneur d’hommes, remarquable orateur et terreur des Génois, il fut le premier à unir vraiment, jusqu’à son assassinat, le Pumonte et le Cismonte, ces deux parties de la Corse qui se tournent le dos. Parce que pour les Corses il savait être un « paceri », un faiseur de paix. Les Corses connaissent ses guerres et ses victoires, comme sa mort par la traîtrise de Vittolo, son écuyer et sa part d’ombre sur la fin de sa femme Vannina. Rappelons que, devenu célèbre par ses hauts faits sur le continent, il décida Henri II, fils de François 1er, à venir aux secours des Corses en révolte contre Gênes. Les Génois furent chassés de l’île et le 15 septembre 1557 Jourdan des Ursins, au nom de son roi déclara l’île « incorporée à la couronne de France en telle sorte que le roi ne put jamais l’abandonner, à moins qu’il n’abandonnât sa propre couronne. » Mais le traité de Cateau-Cambresis rendit la Corse à Gênes. Sampiero va alors parcourir l’Europe et approcher ses princes pour trouver des alliés. Reçu avec tous les égards en vertu de sa réputation de bravoure et de loyauté, il n’obtint pas satisfaction. Il débarqua de nouveau dans l’île avec 25 Corses et 25 Français et coula les deux galères qui l’avaient emmené. Les Génois le firent assassiner en 1567. Que reste-t-il matériellement de ce souvenir ? La statue de Bastelica, une stèle à Bastia, là où il débarqua au début de la lutte. La plaque de Bonaparte-Wyse, neveu de l’Empereur gravée en corse « A lu più corsu di li corsi / Sampiero / Eroe grandiosu / Fra l’innumerevuli eroi… » Une plaque encore sur la citadelle d’Ajaccio, datant de 1554 et portant ce texte : « Henri II, roi de France et seigneur de l’île de Corse. » Quelques unes de ses lettres. Et enfin le chant de guerre reprenant son appel aux armes :»Il rimore della guerra a riscossu valli e monti / Sampieru giunge e vole che guerrieri sianu pronti.. » On ne s’étonnera pas que ce chant ait été repris par Jean Nicoli « Ritti Corsi/Corsi ritti/ Siate Cors’e Francesi : Tutt’ all’armi corsi arditi/ Morte, morte ai numighi. » Ce fut le chant de guerre du Front National. Simon Vinciguerra, poète et résistant avait composé, lui aussi, le « Chant des maquisards corses au maquis en 1942-43 :»Di la guerra a scuppiatu lu rombu/ U nimicu ha bercatu lu mare/ Ma Sampieru ha sunatu culombu/ E all’armi ci torna à chiamà »
Marc’Aureliu Pietrasanta