Il n’est que temps de mentionner le bicentenaire de la naissance de Liszt, né à Raiding (Hongrie, aujourd’hui en Autriche) en 1811. Destiné à l’étude de la musique par son père, au service des princes Esterhazy, il commence à se produire en public comme pianiste dès 1820. Après une période d’études à Vienne, il s’installe à Paris et joue régulièrement en France, en Angleterre et en Suisse. Interrompant provisoirement sa carrière de concertiste pour approfondir sa culture musicale, il se consacre à la poésie et à la philosophie, fréquentant Lamartine, Hugo, Lamennais, Heine, Berlioz et Chopin. En 1835, il gagne la Suisse avec l’épouse du comte d’Agout dont il aura trois enfants notamment Cosima qui deviendra la femme du chef d’orchestre éminent qu’était Hans von Bülow, puis de Wagner. La période de ses plus grands triomphes comme pianiste commença en 1839. Jusqu’en 1847, il fut le virtuose le plus admiré, le plus discuté aussi, mais le plus rétribué d’Europe. C’est à ces années qu’appartiennent les compositions pour piano les plus fortement marquées. Citons les deux premiers volumes des « Années de pèlerinage », « Les vingt quatre Grandes Etudes » et les « Six Etudes d’exécution transcendante » A la fin de 1847, il se fixa à Weimar, se consacrant à la composition, à la direction d’orchestre et à l’enseignement. A cette époque remontent les œuvres animées d’un ample souffle structurel comme l’admirable « Sonate en si mineur », et la « Faust Symphonie ». Il s’éteignit à Bayreuth en 1886. Dans son ensemble l’œuvre de Liszt embrasse la plupart des genres musicaux. On citera les Oratorios « Christus », un grand chef d’œuvre, et « La légende de Sainte Elizabeth », deux Concertos et trois Fantaisies pour piano et orchestre et, outre quatre vingt lieder, un grand nombre de pages religieuses. Il faut mentionner aussi ses œuvres pour orgue dont le Corse Jean Costa enregistra l’intégrale, lui conférant le Grand Prix du Disque. La production de Liszt, comme on voit, est d’une abondance assez prodigieuse Elle est dominée par une liberté absolue face aux schèmes traditionnels .On remarquera la haute valeur esthétique des « Années de pèlerinage » inspirées et exigeantes. La version qu’en proposa Lazar Berman en 1977, mais ressortie en 2002, demeure une référence sûre(1). Berman avait tout pour exécuter l’ouvrage : la puissance, la vision, des doigts forts. Quant à l’œuvre, elle témoigne de cette quête intellectuelle de Liszt contenant en germe toutes les dispositions psychiques qui l’orientèrent vers la recherche de l’absolu, par les amours humaines, l’art et la religion. Les Années de pèlerinage accompagnent la lumière d’un artiste dont la nostalgie de l’absolu s’identifie à un sens mystique de l’art.
Vincent Azamberti
(1) Deutsche Grammophon 471 447 - 2