Philippe Antonetti nous raconte l’histoire de Scirocco
Philippe Antonetti est un homme passionné. Pour les chevaux tout d’abord, et pour la bande dessinée ensuite. C’est donc tout naturellement que ce dernier a décidé de réaliser une série mettant en scène un cheval. Le tome 2 de « Scirocco » arrivera dans le courant de l’année dans nos librairies. Nous avons rencontré Philippe Antonetti.
Philippe Antonetti, pourquoi avoir eu envie de raconter l’histoire de Scirocco ?
Je suis un déjà vieux cavalier (43 ans d’équitation !) et je commence à avoir une certaine expérience en tant qu’éleveur. Le premier poulain que j’ai fait naître, Zampaglinu, est mort l’an dernier à l’âge de 25 ans. Enfant, je m’occupais pendant les vacances de ses grands parents appartenant à un ami uccianais. Il y a une vingtaine d’années, j’ai obtenu un diplôme agricole en Normandie dans le but de monter un élevage professionnel de chevaux arabes, projet qui n’a malheureusement pas vu le jour. Bref, le cheval me passionne. Parallèlement, plus jeune, j’avais une passion pour la bande dessinée et avais même remporté un concours organisé par le magazine Pilote. C’était l’époque où les magazines de BD se cassaient la gueule les uns après les autres. Peut-être aussi que mon travail de l’époque manquait de maturité… J’ai donc mis la BD de côté pour la peinture et l’illustration avec des expositions en Californie, à Madrid. J’ai aussi été le premier peintre corse invité par la municipalité de Cagliari. J’ai aussi publié un recueil de dessins humoristiques sur l’affaire des paillotes, suivi par une collaboration à la revue A pian d’Avretu avec la création de Capitan’Corsica, super héros corse immobile, larmoyant, nostalgique et mythomane. Sous l’impulsion de Bernard Biancarelli des éditions Albiana, nous avons créé la petite sœur BD de a pian d’Avretu, u Musconu, avec l’intention de fédérer les énergies considérables qu’on percevait en Corse autour de la BD. J’avais entrepris d’adapter une nouvelle issue de Prighjuneri de Marcu Biancarelli. Deux numéros seulement sont parus, donc seulement deux chapitres de « L’omu ch’un pudia unurà a moglia ». Le virus de la BD est donc revenu m’infester progressivement. Mon envie de transmettre ce que j’avais appris des chevaux par le biais de la bande dessinée m’est apparue progressivement comme une évidence et je m’y suis donc attelé en imaginant la série « Scirocco ».
Comment travaillez-vous ? Quelles sont vos méthodes pour faire un album de bande dessinée ?
Question complexe… Une succession d’illustrations même excellentes ne fera jamais une bonne bande dessinée mais un livre d’images. De même, un scénario parfaitement huilé fonctionnera différemment suivant le graphisme. Imaginez Hergé dessinant Corto Maltese ou le style de Vuillemin ou de Reiser pour Astérix… Un exemple au cinéma : le remake sexy du magnifique Casablanca, Barb Wire avec Pamela Anderson. Comme la plupart des hommes, je préfère nettement la plastique de Pamela Anderson à celle d’Humphrey Bogart, pourtant, sur la même trame scénaristique, Casablanca est un chef d’œuvre et Barb Wire un navet infâme. Une bonne narration exige une adéquation entre sujet, mise en scène et graphisme et une grande cohérence dans le graphisme. Ma seule méthode est de chercher cette cohérence, de chercher à bien raconter sans esbroufe et effets gratuits.
Pourquoi avoir fait le choix du noir et blanc ?
Pour les raisons exposées précédemment, j’ai estimé que la couleur n’apportait rien au récit. De plus, mes références et mes goûts personnels, Pratt, Breccia, Toth, Bernett, m’incitent au noir et blanc.
Quel regard portez-vous sur la BD insulaire ?
On avait lancé U Musconu parce qu’on avait perçu une énergie énorme autour de la BD en Corse. Cette énergie est toujours présente et commence à se voir, tant mieux !
Quels sont vos projets à courts et moyens termes ?
Continuer Scirocco, bien sûr, avec le tome 2 pour cette année. Un projet autour des Pogues pour lequel j’ai eu leur accord, mais il doit encore mûrir. En réalité, il y a une foule d’histoires que j‘ai envie de raconter…
Les auteurs BD aiment les séances de dédicaces ? Et vous ? Où pourra-t-on vous voir dans l’avenir ?
J’adore ! C’est l’occasion de connaître son public, de l’écouter. La création n’a de sens que dans ce partage et cet échange. Je vais normalement à un festival en Normandie, au mois de mars, justement là où j’avais suivi ce stage d’élevage équin. Scirocco devrait y être bien accueilli. L’album avait reçu une mention spéciale de la part des membres des Haras au grand prix des Haras du festival de Cluny, en mai dernier.
Francescu Maria Antona