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AU BOUT DU CHEMIN

jeudi 25 octobre 2012, par Journal de la Corse

Nouvelle vague napoléonienne à Bastia avec la brillante conférence de l’historien Jean Tulard, de l’Institut, spécialiste de l’Empereur. Sujet : la bataille de Marengo, le 14 juin 1800, et la victoire de Bonaparte sur les Autrichiens. Coïncidence des dates.

Dés novembre 1800, Napoléon fait part à André François Miot, conseiller d’Etat, de son projet de lui confier la mission d’administrer la Corse. Preuve que depuis 1789 il n’a cessé de s’intéresser à son pays natal. Ceci malgré une idée reçue qu’il n’a rien fait à son avantage. Le 7 juin 1801, Miot était nommé commissaire extraordinaire par le Premier Consul. Il avait pleins pouvoirs pour gouverner dans l’île et le 5 juin 1801 il prit ses arrêtés instituant un tarif douanier spécial. Ils seront complétés ensuite par le décret impérial du 24 avril 1811 qui contenait aussi des dispositions de tarif douanier. Miot avait reçu des directives pour le développement de l’agriculture, l’amélioration des villes et l’ouverture de routes carrossables. Il formula ses arrêtés fondés sur une approche pragmatique de la situation de l’île qu’il quitta définitivement le 24 octobre 1802. Dés lors, les dispositions fiscales du Consulat et de l’Empire, connues sous le nom d’arrêtés Miot, devinrent jusqu’à nos jours le symbole du statut fiscal particulier de la Corse. Ils ont fait couler beaucoup d’encre et suscité de nombreux débats politiques et rapports. Les physiocrates, économistes de l’époque considéraient l’agriculture comme fondamentale pour le développement économique d’un pays. Miot s’en inspira aussi avec pragmatisme dans ses arrêtés. Le monde politique et juridique du XIXe siècle mit en cause la validité des arrêtés Abbatucci, ministre de la Justice de Napoléon III déclara : « Les arrêtés Miot ont été consacrés par l’adhésion de tous les gouvernements qui se sont succédés en France depuis cinquante ans. » Au début du XXe siècle, ce fut leur efficacité que l’on dénia. Ces arrêtés consentaient un tarif douanier réduit aux produits étrangers à leur entrée en Corse soit un tiers du tarif étranger de la métropole. Mais en contrepartie de cette réduction, le même tarif entier était appliqué aux produits corses exportés en métropole. Ce plein tarif imposé par les arrêts Miot à l’entrée des produits corses en métropole était désavantageux pour l’économie insulaire dont il gênait voire même empêchait le développement industriel et commercial. C’est une telle nocivité que dénoncèrent les rapports des commissions Clémenceau et Delanney au début du XXe siècle. Elles eurent pour effet la suppression de cette barrière douanière par la loi du 8 juillet 1912 modifiant les arrêtés Miot. Seule en a subsisté aujourd’hui l’exception en faveur de la Corse concernant la taxation du tabac et l’exonération de la TVA sur les transports maritimes (amendement Filippi). Autre effet du rapport Delanney, la taxation nouvelle des produits importés avait pour contrepartie le versement au département de la Corse d’une subvention annuelle de 500.000 francs pour des travaux d’intérêt public. Cette subvention ne dura que 30 ans. Elle fut supprimée par le gouvernement de Vichy. Aujourd’hui, après approbation par l’Assemblée de Corse, le 12 juillet 2000, l’exonération des droits de succession par les arrêtés Miot a cédé la place à un retour au droit commun, en contrepartie d’autres réformes et subventions. Une période transitoire d’exonération complète pendant 10 ans avait été prévue, puis pour une période de 5 ans une exonération de 50%. Aujourd’hui les arrêtés Miot sont au bout du chemin. Sauf nouvelle prorogation.

Marc’Aureliu Pietrasanta

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