On connait Antoine Giacomoni, photographe maître dans l’art du noir et blanc, portraitiste inspiré de l’underground rock et dont l’objectif a si bien restitué une galerie d’insulaires anonymes ou célèbres. A « L’Isula », la boutique aux trésors de Patrizia Poli, on découvre d’autres talents de l’artiste.
Beaucoup de charme, de poésie, de sophistication dans ces « cartons plume » alliant icônes et incrustations, mariant légèreté et rigidité. Sous une apparente préciosité une spontanéité recherchée invitant à la rêverie, au sourire, à l’apaisement. Curieux mélange porteur d’énigmes, de secrets en attente de résolution. Déclinaisons de diptyques, de triptyques dont certains dédiés à ceux ou à celles qui ont guidé la route de l’artiste, l’ont infléchi, orienté pour l’aider finalement à se construire. Autant d’hommages pudiques … et éclatants. Autant de sincérité vraie car dénuée de cette fausse chaleur humaine si navrante et dérisoire. Des objets exclusifs viennent enrichir cette balade du regard. Objets détournés. Objets re-composés. Objets ré-inventés. Là encore l’imagination se donne libre cours. Objets matérialisant un passage à une troisième dimension pour le photographe qu’est Giacomoni. Ils intriguent ces objets tout droit issus de « cabinets de curiosité » ou de « théâtres de l’étrange ». Lanterne magique, coffres aux merveilles, ostensoir ré-interprété, maison miniature ésotérique, miroirs rappelant l’omniprésence du double et de la dualité des choses et des êtres. La démarche d’Antoine Giacomoni évoque celle des alchimistes osant combinaisons audacieuses de matières et amalgames téméraires d’ingrédients. Cette exposition ponctuelle, atypique, éphémère est le résultat d’un travail de longue haleine – dix ans – qui a pris corps petit à petit. Tout est parti d’un jeu de tarot engendrant une succession d’études. Ce ne devait être qu’une suite d’exercices en guise d’échappatoires pour s’évader du cadre étroit de la carte à jouer afin de le réintégrer ensuite. Par amitié pour Patrizia Poli l’artiste s’est décidé à révéler au public sa récolte. A dévoiler sa moisson. Riche idée !
Michèle Acquaviva-Pache