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A la rencontre d’un scénariste corse

jeudi 19 juillet 2012, par Journal de la Corse

Avec bientôt 20 albums BD au compteur (1), Frédéric Bertocchini est un scénariste inspiré et prolifique. Ce dernier nous raconte la Corse, au travers plusieurs séries historiques, des drames et des thrillers liés à notre île. Mais il s’est également ouvert à d’autres horizons, à d’autres histoires et de nouvelles aventures, qui le portent quelquefois bien loin de la Corse, jusqu’au Danemark, à l’Italie, au Chili et aux Etats-Unis... Rencontre...

Avec Libera me et Le Horla, on peut dire que vous vous intéressez à des univers très différents cette année ?

Oui en effet. « Libera me » est une pure création. Un travail d’équipe, puisqu’en plus du dessinateur (Espinosa) et du coloriste (Nino), j’ai travaillé avec un autre scénariste, Miceal O’Griafa. Cet album, « Ribelli », qui lance cette série, est un thriller politique, une vision de la Corse et de l’Irlande contemporaine. Quant au « Horla », comme son nom l’indique, il s’agit d’une adaptation très libre de la nouvelle de Guy de Maupassant. Nous avons cette fois-ci travaillé en comité restreint, puisque Eric Puech a réalisé les dessins, ainsi que les couleurs.

Est-ce compliqué de passer d’un univers à l’autre ?

Non. J’ai débuté dans la BD avec des récits historiques (Pasquale Paoli, Le Bagne de la Honte, avec Rückstühl). Ayant une formation d’historien, c’était plus facile pour moi. Mais je me suis ensuite essayé à d’autres genres. Il y a bien entendu des veines dans lesquelles je me sens plus à l’aise, mais in fine, c’est agréable de travailler sur des thématiques si différentes. J’aime bien les biopics rock’n roll aussi. Après « Jim Morrison », « Poète du Chaos » (avec Jef, 2010), il y aura « Janis Joplin », « Pearl », l’an prochain. Ca m’éclate complètement ces road movies américains dans les années 60... Ou encore des récits d’aventures, comme La Cordillère des Ames (avec Thierry Diette), qui se déroule au Chili, et un conte danois du XIXème siècle, « Kirsten ». Mais je n’oublie pas la BD historique corse. « Colomba » sortira dans quelques jours, chez DCL (avec Sandro et Nino), et le premier opus de « Sampiero Corso » (avec Rückstühl et Langlois) en octobre. Je tiens vraiment à poursuivre la fresque historique consacrée à la Corse. Déjà parce qu’il y a un public pour ça chez nous, mais aussi par militantisme culturel. Pour surfer sur ces différents univers, le tout, c’est de terminer ce que l’on a commencé. Je pense que j’aurai du mal à écrire plusieurs histoires en même temps. Je n’attaque un scénario qu’après en avoir terminé un. Et lorsque des idées me viennent, je les range, le temps de terminer le boulot en cours.

Les dessinateurs sont également différents. La gestion est-elle facile ?

Oui. Car nous sommes une bande de copains, ou d’amis. Nous nous faisons mutuellement confiance, et nous nous sommes réunis en un collectif, « L’Académie des Furieux de la BD », dans lequel on trouve des auteurs venus d’horizons différents (2). C’est une véritable force. Lorsque l’un de nous cherche un dessinateur, un coloriste, un scénariste, voire même un éditeur, les réseaux se mettent en route. C’est donc un gros plus pour nous tous. Et un gain de temps énorme. Cela m’a permis de collaborer avec 8 dessinateurs en tout.

Quel est l’accueil pour « Le Horla » et « Libera me » ?

Excellent ! « Le Horla » est resté plusieurs semaines à la première place des ventes FNAC, dans la catégorie « BD littéraires ». Quant à « Libera me », notre éditeur a lancé le second tirage un mois seulement après la sortie du premier. Avec cette série, nous marchons sur des œufs. Il s’agit d’une fiction, sur fond historique véritable. Il s’agit de faire une BD intelligente, de divertir, tout en évitant de toucher à des plaies qui sont mal refermées. Pour le moment les retours sont plutôt positifs.

On pourra vous voir dans des salons ?

Oui. Avec quelques « Furieux », on tournera cet été dans toute la Corse. Mais pas seulement. Nous avons beaucoup de dates sur le continent, et des invitations dans des festivals. Parmi les plus importants, Ajaccio bien sûr (5-6-7 octobre), ou encore le « Quai des Bulles » de Saint-Malo (2013), « BD Boum » à Blois (novembre 2012), et peut-être à Bastia, festival que j’ai découvert cette année, et que j’ai beaucoup apprécié. En septembre, les planches originales du « Horla » seront exposées à Paris, dans une galerie (galerie du Marais), place des Vosges. C’est la première fois qu’on verra de la BD dans cette grande galerie. C’est un grand honneur que l’on nous fait.

Vous faites des BD à l’échelon régional, national... En attendant mieux ?

L’album sur Jim Morrison a été publié dans 5 langues et 9 pays. Et ce n’est pas fini. D’autres albums viendront sans doute, puisque des négociations sont en cours entre les différents éditeurs concernés. C’est vrai que c’est une belle cerise, mais ce n’est pas une fin en soi en ce qui me concerne. L’essentiel est de se faire plaisir, de faire des albums qui plaisent. Ensuite, que ces livres franchissent les frontières, c’est forcément un plus.

Philippe Peraut

(1) Paoli (3 tomes), Jim Morrison, Poète du Chaos, Le Bagne de la Honte (2 tomes), Physio, Coup de foudre au Locle, PréJugés, Bienvenue au Locle, Histoires corses, L’Astrocorse, Petru Santu, Le Horla, Libera me, et prochainement La Cordillère des Ames (2 tomes), Janis Joplin, Pearl, Kirsten et Colomba. (2) Les auteurs qui composent L’Académie des Furieux de la BD sont : Marko, Sandro, Miceal O’Griafa, Olier, Taduc, Al Coutelis, Frédéric Bertocchini, Michel Espinosa, Eric Rückstühl, Thierry Diette, Pascal Nino et Eric Puech.

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