Semaine sainte. Jours des palmes et des rameaux d’oliviers. Commémoration de l’entrée de Jésus à Jérusalem entouré d’une foule joyeuse. Cette année Porto-Vecchio a donné le branle télévisé, avec sa confrérie processionnelle à cape rouge au milieu de la ferveur populaire brandissant les « crocette » en palmettes.
A la joie succèdera la tragique passion des Ténèbres et de la Passion. Aujourd’hui les villages sont déserts et ne retentissent plus, sauf quelques uns, à l’appel des crécelles remplaçant les cloches « parties à Rome », comme on disait, ni du chant lancinant des fidèles « Perdono mio Dio, mio Dio perdono/Perdono mio Dio, Perdono e pietà. » La plainte se poursuivait un temps interminable jusqu’à la dernière strophe : « Del cielo la gloria Gesù la darà. » Car la foi, comme la semaine liturgique, débouchait sur l’espérance du jour de la résurrection. Les cérémonies étaient scandées par le bruit des crécelles (ragane) et des battoirs (ratacchie) appelant les fidèles. Inutile de dire que les garnements qu’étaient les enfants de chœur s’en donnaient à cœur joie. Le « raganone » lui était dans le grand meuble de la sacristie. Dés le lendemain des « palmi » ou de « l’alivu », les volontaires hommes, confrères, et surtout femmes, jeunes et vieux préparaient le reposoir (ripunitoghju) ou « sepolcru ». Sur le côté d’une chapelle au milieu de l’église les tentures blanches étaient recouvertes de vases pleins de bouquets de fleurs et de verdure. Au pied du sépulcre se multipliaient les cierges allumés par les participants. Et la nuit du Jeudi Saint commençait avec le prêche du curé et les bénédictions liturgiques, martelées par le « perdono mio Dio ». Le Vendredi Saint c’était l’Office des Ténèbres. Le dernier cierge était éteint et le tapage de cris et de coups de bâton (battulelli) sur les bancs se déchaînait. Tous les garçons du village transformés en sacripants s’en donnaient à tout va. Le Samedi Saint, vers dix heures du matin une fusillade saluait la résurrection du Christ et le retour des cloches de Rome. Le prêtre bénissait l’eau sacrée avec le feu de la lampe à huile qui ne s’éteint jamais et renouvelait ainsi l’eau bénite des fonts baptismaux. Puis c’était la fête de Pâques, la messe, l’Alleluia, le « Te deum » et la fête profane dans les maisons entièrement nettoyées et bénites la veille par le curé. C’étaient alors des gâteaux de toutes sortes (torte, pastizzi, etc..) après le long carême. Oui, mais les traditions se perdent. Hélas !
Marc’Aureliu Pietrasanta