Francesca Weber Zucconi plonge le lecteur dans la région de son enfance. La Dormeuse de l’Alta Rocca a été récompensée par le prix Polina da Mela de 2010 pour la façon onirique que l’auteur a eu de mettre en valeur cette terre de légendes. Il s’agit de son deuxième ouvrage, qui reste dans cette veine des nouvelles ancrées dans la tradition corse, toujours féminine et fantastique, sauvage et secrète.
Alta Roca au cœur
Trois nouvelles au tempo très « Alta Rocca ». Le rythme des nouvelles permet à Francesca Weber Zucconi de tout mettre en concentré, sa passion pour sa région, les liens que l’on tisse avec ses origines, utilisant les forces du genre pour mettre en lumière des situations fabuleuses. Et l’auteur de nous entrainer dans des chemins intimes mêlés de souvenirs et de fantastique, car « ici, dans l’Alta Rocca, sur les bords du Rizzanesi, il existait des portes mystérieuses », ainsi que Davia, l’héroïne de La Dormeuse va en faire l’expérience, revenant à la source « au lieu d’entre les lieux ». Et si Davia était l’auteur qui profite de ses écrits pour faire revivre sa mémoire, ainsi qu’elle le dit : « mais la mémoire, augmentée de l’amour d’un territoire, de l’attachement à une montagne, à une vallée, à une rivière, à une piève, conjurait le temps, reconquérait la vie de cet espace et l’identité de ce lieu ».
L’art de la nouvelle
Même si les personnages sont moins développés que dans le roman, le lecteur peut s’attacher à eux, car ils ont une densité onirique qui leur confère une sorte d’aura supra-humaine. La Dormeuse de l’Alta Rocca peut aussi se lire comme une déclaration d’amour pour cette région, tant les descriptions en font une évocation féminine intense et séduisante. Cosima est une histoire merveilleuse qui révèle des secrets, notamment celui d’une mazzera, mais aussi parce qu’elle est le récit d’un héritage, d’une continuité de l’histoire familiale, un lien intemporel et spirituel entre Parsilia et Cosima, l’arrière-arrière grand-mère paternelle. Enfin, la dernière nouvelle de ce recueil, La fée du Rizzanesi est comme un message écologiste, empreint de merveilleux, contre les projets de modification de la nature par l’homme, dans laquelle l’auteur donne corps et voix à la terre.
Myriam Mattei
Francesca Weber Zucconi, La dormeuse de l’Alta Rocca, Colonna édition, 118 pages, 12 €