On l’attendait pour les fêtes, mais l’album est arrivé en librairie en ce début de mois de janvier : Sampiero Corso est enfin porté en bande dessinée. A la réalisation de cette nouvelle saga, l’équipe désormais bien connue Bertocchini-Rückstühl, qui a déjà fait ses preuves dans le genre, avec « Pasquale Paoli » et « Le Bagne de la Honte ». Les auteurs BD poursuivent ainsi leur grande fresque historique consacrée à la Corse, en s’attaquant cette fois-ci à un autre grand mythe insulaire, Sampiero Corso. Le tome 1 vient de paraître aux éditions DCL et s’intitule « Le Colonel ». Interview avec le scénariste, Frédéric Bertocchini...
Il s’agit de votre troisième collaboration avec Eric Rückstühl, le tandem semble bien fonctionner...
En effet, Eric dessine la Corse depuis vingt ans, et c’est pour moi le dessinateur idéal pour poursuivre cette grande fresque historique sur la Corse. Indépendamment de l’amitié qui nous lie, je pense que les albums gagnent en qualité au fil des parutions. Notre collaboration s’affine et est aujourd’hui plus mature. De ce fait, nous nous sentions prêts à nous attaquer au mythe Sampiero.
Sampiero, après Paoli, ces mythes ne vous impressionnent-ils pas ?
Ils me passionnent surtout. C’est sûr que s’attaquer à de telles légendes met un gros coup de pression. Il s’agit de ne pas pervertir les personnages, tout en les décrivant de façon attractive et de les façonner comme de vrais personnages BD. Il faut trouver l’équilibre entre la rigueur historique et l’intrigue BD.
Justement, entre Paoli et Sampiero, qu’est-ce qui a été le plus difficile à scénariser pour vous ?
C’est très différent ? Avec Paoli, je débutais dans la BD, je n’avais donc pas tous les mécanismes narratifs propres à la bande dessinée. Quant à Eric Rückstühl, c’est la première fois qu’il collaborait avec un scénariste. La difficulté de travailler sur Paoli était sans doute la masse d’information qui était à ma disposition. Les correspondances de Paoli par exemple, sont une source exceptionnelle. Nous aurions pu réaliser 10 ou 12 tomes sur la vie du Babbu, plutôt qu’une trilogie. Ensuite, Paoli est encore très présent aujourd’hui dans le quotidien des Corses. Non pas par son histoire, mais par ce qu’il représente, politiquement et symboliquement parlant. Je savais que je marchais sur des œufs avec un tel mythe. Avec Sampiero, la problématique est vraiment différente. Les sources sont beaucoup moins nombreuses, surtout en ce qui concerne la jeunesse du héros. En écrivant le script, j’ai donc eu une part de liberté assez intéressante, qui m’a permis de développer un véritable héros BD, tout en le maintenant dans une rigueur historique que j’espère être assez costaud.
Que peut-on découvrir dans ce premier épisode ?
L’histoire commence à Bastelica, lorsque Sampiero a une dizaine d’années. Il sait qu’il va quitter la Corse, prochainement, pour parfaire son éducation militaire. En attendant, il enrage de voir les châteaux des Seigneurs locaux brûlés par les Génois. Ensuite, commence la saga : il part à Florence, sert les Médicis, rencontre Jean des Bandes Noires, combat à ses cotés. Il voit Rome, assiste au mariage de Catherine de Médicis et du dauphin de France à Marseille, propose à François 1er d’assassiner Charles Quint... Il est grièvement blessé sous les murailles de Perpignan. Mais au-delà de ça, Sampiero pense toujours à la Corse. Il promet aux D’Ornano, une famille pro-génoise de Corse, qu’il épousera Vannina. Forcément, à l’histoire de Sampiero, vient se joindre celle de Vannina.
Comment Sampiero est-il décrit dans votre bande dessinée ?
Paoli était un homme raffiné, élégant, un intellectuel. Sampiero est décrit, dans la BD, comme un homme beaucoup plus rustre. Il est vulgaire, coquin, grossier. Un guerrier médiéval dans tous les sens du terme, même si nous sommes en pleine Renaissance. Mais il est aussi généreux, fidèle aux Médicis et à certains de ses principes. Sa haine des Génois ne faiblit jamais. C’est un vrai héros de bande dessinée. Il brille par son audace, son courage. Certes, il est colérique, enragé, mais n’oublions pas qu’il est né dans une Corse féodale, pauvre et fortement perturbée par les guerres.
Et le tome 2 ?
Il s’appellera Vannina D’Ornano. Dans le premier épisode, nous racontons comment Sampiero est devenu « Le Colonel ». Dans le second tome du diptyque, nous mettrons l’accent sur les rapports tumultueux entre Sampiero et sa jeune épouse. L’album sera plus politique aussi. Nous le verrons mener la guerre en Corse une première fois, puis une seconde, jusqu’à ce bain de sang non loin des eaux du Prunelli près d’Eccica-Suarella. L’album sortira en décembre 2013.
E.C.