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Une dérive angoissante

jeudi 29 novembre 2012, par Journal de la Corse

18 personnes ont été assassinées en Corse. Et les grandes déclarations d’intention du gouvernement n’y ont rien fait même si tout citoyen normalement constitué ne peut qu’espérer une victoire de la justice sur le crime. Il est indubitable que la décomposition de la société corse a produit une dérive mafieuse et que l’argent sale a contaminé l’ensemble des circuits économiques de l’île. Pour autant, il n’existe pas en Corse de mafia dans le sens d’un système centralisé reliant le pouvoir politique, économique et délinquant.

Une dérive mafieuse avérée

Le dernier assassinat dont la victime est un entrepreneur laisser penser que la concurrence économique dans le domaine du bâtiment est de plus en plus rude et que les règles sont plus encore celles de la violence et des pressions en tous genres. Dans les microrégions littorales, le grand banditisme fausse les règles pour capter des marchés. Il est tout aussi indubitable que des franges dévoyées du mouvement nationaliste ont dérivé vers ce cloaque et qu’il devient souvent difficile de tracer des frontières stables entre les uns et les autres. La déliquescence de la société insulaire, la carence des banques en matière d’investissement, les atermoiements de certains politiques, les calculs à la petite semaine de certains policiers, ont créé une situation de conflit meurtrier. La société corse a tout à craindre de cette dérive mafieuse qui mêle racket, assassinat et captation de fonds public. Pour autant, il est impossible de conclure à l’existence d’une mafia corse comme l’affirment ces spécialistes continentaux de la grande délinquance. Est-ce que c’est plus rassurant pour autant ? Au contraire. Un système mafieux suppose une centralisation des intérêts et des démarches. En Corse, l’éparpillement des bandes favorise la multiplication des assassinats. Mais la situation n’est guère plus plaisante à Marseille qui combine tous les ingrédients d’une véritable situation mafieuse : ripoux policiers, relations incestueuses entre la politique locale et nationale, les affaires et le grand banditisme à côté d’une criminalité de cité. Cependant, le journalisme continental ne s’y intéresse que moyennement car la Corse fait fantasmer. Du coup, nos spécialistes de la criminalité insulaire se disputent à coups d’analyses plus ou moins cafouilleuses, hasardant avec une morgue incroyable des explications qui, ici ne tiennent pas la route mais favorisent les rumeurs en jetant des noms sur la place publique en se confrefichant des conséquences quand ce n’est pas en les attendant avec une certaine jouissance.

Les bégaiements de l’état

On ne peut qu’espérer l’arrêt de cette dérive meurtrière dont les origines sont multiples et pourtant dues à la violence. Le mouvement nationaliste peut raconter ce qu’il veut. Il porte une responsabilité dans la situation actuelle en ayant donné aux armes leurs "lettres de noblesse". Il suffit de parler à l’homme et la femme de la rue pour se rendre à quel point, ils en ont aujourd’hui assez de ces conflits qui les prennent en otage. La situation est aujourd’hui angoissante et inacceptable. L’état affirme pour la nième fois qu’il va mettre les moyens de combattre le crime. J’espère de tout mon cœur qu’une justice sereine et locale parviendra à mettre un terme à cette effusion de sang. Mais j’en doute. Le ministre de l’intérieur a montré en désignant Alain Orsoni qu’il ne comprenait rien à l’affaissement de la société corse, à sa perte de repères, à sa dérive économique. Il a donné l’impression qu’un homme pouvait par ses éventuels "aveux" régler la situation. C’est à la fois pathétique et terriblement inquiétant. Le risque est évidemment qu’en dehors de solution à court terme, le gouvernement ne se relance dans une folie à la Bonnet. Il faut le dire et le redire : l’efficacité de la répression tient essentiellement à un renseignement fiable et à des actions appropriées. Le gouvernement n’a plus droit à l’erreur. Il s’agit tout simplement de faire respecter le droit en Corse sans faiblesse et sans excès. C’est désormais une nécessité et un devoir envers nos propres enfants. La tuerie doit cesser en espérant que la sagesse démocratique l’emportera sur la tentation de la brutalité étatique.

GXC

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