L’élue territoriale Marie Antoinette Santoni Brunelli semble être « le seul élu » suffisamment courageux ou lucide pour appeler les Corses à se dresser contre la violence qui ronge notre société. Sa proposition de manifestation, mettant dans la rue côte à côte élus et citoyens, a été repoussée par une commission ad hoc dont la seule fonction semble être de gagner du temps alors qu’un nouvel assassinat endeuille la Corse.
Une proposition courageuse
Bien sûr il sera toujours de bonnes âmes pour affirmer que Marie-Antoinette Santoni Brunelli a cherché à se faire valoir en proposant à Dominique Bucchini, président de l’assemblée territoriale, une manifestation de tous les citoyens de Corse contre la violence. En attendant, elle a été la seule à proposer une action concrète. Par ailleurs, je la crois sincère et spontanée. Et puis, après tout, peu importe la personne. Seul compte la proposition. Contre la violence, toutes les violences, il va bien falloir réagir et cesser d’attendre. Après la tentative d’assassinat perpétrée contre la famille Manunta, l’élue a écrit au président Bucchini : « Je me refuse au cynisme et au renoncement au prétexte que nous ne détenons pas, nous élus, la baguette magique qui pourrait mettre un terme à cette spirale infernale. C’est pourquoi, Président, il m’est venu cette idée que nous, élus de la Corse, avions pour devoir de descendre dans la rue et appeler au plus large rassemblement populaire et dire que nous ne voulons plus être les témoins de cette violence insupportable qui met aujourd’hui en danger les plus innocents comme cette fillette ». Dominique Bucchini est un excellent président et de surcroît un honnête homme. Il n’a jamais hésité à dénoncer les méfaits du grand banditisme dans notre île. Aussi suis-je à l’aise pour lui exprimer toute ma déception après qu’il a avec la commission sur la violence repoussée la proposition de Mme. Santoni Brunelli, proposition qu’elle vient de réitérer.
Une violence faite de violences
La tentative d’assassinat contre la famille Manunta doit nous poser question car elle marque une exponentielle de la courbe délinquante. Mais elle doit aussi nous aider à comprendre que la violence délinquante découle d’un comportement plus général qui explose en ce moment dans toute la société civile. La violence clandestine participe d’un tel processus et la violence d’état se repaît de ces métastases. En toutes époques, les services des puissances régaliennes ont joué de nos haines et de nos médiocrités se nourrissant de nos divisions. Il ne s’agit pas simplement d’une violence conjoncturelle causée comme l’affirme l’expert es violence, Jean-Guy Talamoni, par la spéculation immobilière. La société corse continue de fonctionner fondamentalement grâce à des mécanismes primitifs : clanisme, népotisme, favoritisme, rumeurs et détestation qui sont des facteurs de confrontations. Les solidarités ne jouent qu’en faveur des proches jamais de la société entière.
Une violence sociale insupportable
La proposition de Marie-Antoinette Santoni Brunelli est une bonne proposition car elle oblige les Corses à comme des acteurs de leur propre destin et non plus simplement comme des victimes dont on ne sait quelle fatalité. Une telle démonstration prouverait aussi que nos élus sont capables d’un courage plus démonstratif que la participation à des commissions dont chacun sait qu’elles servent la plupart du temps à enterrer des problèmes plutôt qu’à les résoudre. Il est évident que cette action ne réglerait pas le problème d’un coup mais il témoignerait d’un sursaut. À moins de considérer qu’il n’y a plus rien à faire. Cela étant posé, des élus libéraux tels que Madame Santoni Brunelli devrait se demander si la misère grandissante, les injustices sociales de plus en plus évidentes, fruits d’un système économique totalement inique et cynique, ne sont pas aussi l’expression d’une violence sociale insupportable. Quelles règles communes peut-on prétendre imposer quand des malheureux tentent de survivre avec 400 euros par mois tandis que d’autres, souvent amis de la droite, échappent à l’impôt, quand des élus de droite ou de gauche bénéficient de privilèges exorbitants. Cette violence-là est aussi la pourvoyeuse des autres violences. Et tous les policiers du monde n’y changeront rien. En attendant, vive cette femme, nom de tous ces petits bonshommes !
GXC