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Tourisme Pumataghji, je vous aime !

vendredi 16 août 2013, par Journal de la Corse

Tourisme
Pumataghji, je vous aime !

Eux, au moins, ils achètent sur place et il advient qu’ils se fassent un resto ou, s’il pleut ou sont trop fatigués, qu’ils dorment une nuit à l’hôtel.

Dernièrement, j’étais quelque part sur notre Ile de Beauté. Une amie exploitant un hôtel m’avait invitée à déjeuner dans un établissement jouxtant le sien. Bien qu’Anna me fît bonne figure et que je la ressentisse ravie de me voir, je devinai très vite qu’elle était « noire ». Si bien que je finis par oser lui demander si quelque chose de grave la chagrinait. Après un temps d’hésitation, elle me confia qu’elle en avait marre de gérer son hôtel en faisant de la corde raide et d’entendre les hommes politiques affirmer tout et n’importe quoi sur l’activité touristique. « Pourtant, il y a du monde » lui répondis-je trop vite. « Du monde, quel monde ? Je vais te montrer ce qu’est ce monde ! » me lança-t-elle. Anna étant visiblement en « crise noire », je ne fis aucune difficulté pour la suivre. Passant devant la réception, elle me souffla : « Moins 25% en juin, moins 10 % en juillet, je vais où avec çà ? » et ajouta : « J’espère qu’en déjeunant, tu as remarqué que la terrasse du resto était quasiment déserte ». Il m’eût été difficile de soutenir le contraire. Nous fîmes quelques centaines de pas et arrivâmes sur une aire censée être réservée au stationnement des autos.

Une présence résidentielle
Les autos étaient bien là. Mais un bon tiers des emplacements étaient occupés par des camping-cars. S’ils avaient été en situation de simple stationnement, il n’y aurait pas eu matière à redire. Mais la réalité était bien autre. Portes et trappes ouvertes, auvents et parasols déployés, tables de camping dépliées où trônaient bouteilles entamées, canettes vides et reliefs de repas, petites culottes, slips et tee-shirts et séchant indécemment sur des fils tendus entre deux véhicules, piscines gonflables où s’ébattaient des marmots aussi blanchâtres que bruyants, chairs rougies et dégoulinantes exposées sur des chaises longues, tout indiquait que l’on était passé du stade « arrêt prolongé » au stade « présence résidentielle ». Et ce tableau avait pour arrièreplan des corbeilles à papier vomissant des monceaux de déchets ménagers. « En France, ils se plaignent des Roms. Nous, nous avons les « lumache » commenta mon amie. Ajoutant : « Sauf que le Rom, le pauvre, il ne peut pas faire autrement. Il n’a pas de chez lui reconnu et décent. Alors que ceux-là, ils ont un pavillon, une villa, un appart ou au moins un HLM ! ».

Le touriste nouveau
Je ne savais que dire partagée que j’étais entre le sentiment que mon amie tenait des propos excessifs, et la vision d’un spectacle vivant qui rendait ses paroles recevables. Une question me brûlait cependant les lèvres. Je la posai : « Pourquoi les traites-tu de « lumache ? ». Elle éclata de rire avant d’expliquer : « Ne sais-tu pas que le touriste nouveau est sur le marché. L’été, les classes moyennes ne laissent plus leurs sous ni chez moi, ni au resto, ni chez Casino. Moins friqués et moins sédentaires, ils se sont convertis au camping-car et à l’autosuffisance. Aussi, je les appelle les « lumache » car, comme les escargots, ils voyagent avec leur maison. Et je t’avoue que je préfère cent fois les « pumataghji » avec leur sacs-à-dos car, au moins, ils achètent sur place. Il arrive même qu’ils se fassent un resto ou, s’il pleut ou s’ils sont trop fatigués, qu’ils dorment une nuit à l’hôtel. Alors que les « lumache », ils font leurs courses chez eux avant de passer la mer, et consomment essentiellement ce qu’ils ont apporté. Bref, hormis leurs déchets et leur, tu vois ce que je veux dire, ils ne nous laissent rien ! » Foi d’Alexandra, je ne me moquerai plus jamais des « pumataghji » !

• Alexandra Sereni

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