Le dix septembre célèbre la Journée mondiale de prévention du suicide. Avec plus de 10 000 morts par an, le taux de suicide en France est l’un des plus élevés d’Europe. Même si la tendance est aujourd’hui à la baisse selon la Direction de la recherche des études, de l’évaluation et des statistiques, le suicide reste plus meurtrier que les accidents de la route. Des chiffres qui ne font que confirmer que la prévention du suicide est un problème majeur, à considérer sérieusement.
Observer et prévenir
En mai dernier, Libération publiait « l’appel des 44 », soit 44 spécialistes (médecins du travail, psychiatres, psychologues et sociologues) demandant la création d’un observatoire des suicides et des conduites suicidaires en France afin de mieux connaître le phénomène et améliorer la prévention. Les professionnels signataires de cet appel estiment que « la question touche les seniors, les jeunes, les familles, mais aussi les entreprises, le monde agricole, les ministères, les services publics (police, pénitentiaire, hôpitaux) ». Il faut dire que l’état des lieux du suicide en France – grande consommatrice de psychotropes est-il besoin de le rappeler – est plutôt grave selon les dernières estimations de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), un peu plus de 10 000 suicides se seraient produits en 1999, avec une sous-évaluation reconnue car le recueil des suicides est difficile. On serait donc plus proche de 12 000. Selon les chiffres du CépiDc (centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès), la Corse a enregistré sur la période 2007-2009 une moyenne de 36 décès par suicide (19,3 % d’hommes et 4,5% de femmes), dont 50 % dans la tranche d’âge entre 35 et 64 ans. Chez les jeunes, la situation est aussi sérieuse sur les 170 personnes suivies par le CRIJ Corse dans le cadre de l’Accompagnement Santé Social du 21 septembre 2009 au 7 juin 2010, « 5,5 % ont déjà pensé au suicide au cours des 12 derniers mois et 5,4 % ont déjà fait une tentative de suicide au cours de leur vie soit 9 personnes ».
Plus mortel que les accidents de la route
Même si la prévalence du suicide augmente avec l’âge – il représente 10 % des causes de décès prématurés des moins de 70 ans –, c’est chez les jeunes qu’il constitue un problème majeur de santé publique puisqu’il est, avec les accidents de la voie publique, la première cause de mortalité entre 15 et 35 ans (exception en Corse et dans le Languedoc-Roussillon où la route reste la plus meurtrière). De nombreux pays sont conscients que le suicide est une cause réelle de surmortalité. La France l’a placé comme priorité nationale, et pas uniquement en prévision d’une baise de moral lié à la crise ou à cause des faits divers du type France Télécom, Éducation nationale, etc. En termes de mobi-mortalité, définie par les DALYs (disability adjusted life years), l’étude de l’École de santé publique d’Harvard, menée avec la Banque mondiale et l’OMS, a classé la dépression au 4e rang sur les 5 maladies mentales parmi les 10 les plus coûteuses ; en 2020, elle pourrait arriver en 2e place, juste derrière les cardiopathies coronariennes. Il a été établi qu’une action volontariste sur cette pathologie est efficace pour en limiter la souffrance individuelle, le coût social et la mortalité suicidaire. Car il faut bien le reconnaître le suicide et les comportements suicidaires ont un coût social indéniable (195 000 cas d’hospitalisation par an sont liés à une tentative de suicide). Pour preuve, la Grèce, où la crise a un coût social à travers son taux de suicide en forte progression +40% lors des quatre premiers mois de l’année. Un phénomène à ne pas prendre à la légère. Et autre « effet marronnier », les fêtes de fin d’année, durant lesquelles la solitude, le mal-être et l’exclusion des préparatifs festifs peuvent être mal vécus. Même si les dates clés ne constituent pas une vérité absolue en la matière, les contextes particuliers (crise économique, guerre, instabilité sociale…) peuvent créer des vagues de suicide. Le pic observé en 1993 correspondait à une année de récession forte. Et depuis peu, l’OMC ose caractériser la période actuelle par ce mot inéluctable… Faut-il craindre une nouvelle vague fatale ?
Maria Mariana
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