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Siège de la CRCI à Bastia La revanche des nordistes

jeudi 13 octobre 2011, par Journal de la Corse

L’option du « siège tournant » a viré au piège. Elle a fait abandonner aux sudistes l’option la plus fiable : faire porter au seul Premier ministre le poids du choix entre Ajaccio et Bastia.

Le siège de la Chambre Régionale d’Industrie et de Commerce doit être fixe et implanté à Bastia. Ainsi a tranché l’Assemblée de Corse, à une majorité relative (22 voix pour Bastia, 12 pour Ajaccio, 4 pour Corte). Elle a ainsi suivi l’avis de la commission mixte réunissant la commission des compétences législatives et réglementaires et la commission du développement économique, de l’aménagement du territoire et de l’environnement, qui a conclu au rejet de l’option du « siège tournant » ; c’est-à-dire d’une alternance entre Ajaccio et Bastia. Tout n’est cependant pas formellement joué. L’Assemblée de Corse n’a délibéré qu’à titre consultatif, la décision appartient à l’Etat, plus précisément au Premier ministre. Il serait toutefois surprenant que François Fillon passe outre le souhait exprimé par les élus insulaires. En réalité, l’affaire est probablement pliée.

Au début de l’été, on allait tourner !

Le vote des conseillers de Corse a mis fin à un feuilleton dont les élus consulaires de la Corse- du-Sud ont été les principales victimes. D’aucuns, plus féroces que votre serviteur, murmurent qu’ils ont été les dindons d’une farce bien connue : l’opposition entre Ajaccio et Bastia. Au début de l’été, ils pensaient pourtant tenir une solution de compromis avec l’option du « siège tournant ». D’autant que cette option semblait avoir l’aval du président du Conseil exécutif. Paul Giacobbi avait affirmé que la possibilité d’un siège tournant représentait « la voie de la sagesse ». Il avait aussi développé un point de vue personnel rejetant l’existence d’un « déséquilibre territorial » entre les deux principales villes de Corse, avançant que Bastia accueillait notamment la Cour d’appel, la Chambre régionale des comptes, les sièges de l’ODARC et de l’Office hydraulique. Enfin, il avait inquiété les partisans d’une option bastiaise en observant « qu’un siège régional doit être naturellement installé dans le chef-lieu de région » et que la qualité de capitale économique revendiquée par Bastia était « un peu moins évident qu’auparavant ». Un de nos confrères avait cru pouvoir comprendre : « Dans son esprit (celui de Paul Giacobbi), Ajaccio serait, en définitive, un choix naturel et que les élus consulaires de Bastia ne peuvent pas être raisonnablement frustrés du partage du siège régional ».

Le vent du Nord

En réalité, l’option du « siège tournant » a viré au piège. Elle a fait abandonner aux élus consulaires du sud une option plus fiable et juridiquement imparable : faire porter au seul Premier ministre le poids du choix et exercer un lobbying ajaccien à Paris. Ils ont tardivement ressenti les morsures du vent du Nord stimulé par une volonté d’inverser une histoire des implantations administratives le plus souvent favorables au Sud. Ils ont mis trop de temps à comprendre qu’avoir accepté que l’Assemblée de Corse émette un avis, les conduisait tout droit à Bastia pour au moins trois raisons. La première est que la commission mixte a remis en question l’option du « siège tournant ». Faisant preuve de mesure, elle a préconisé un siège fixe, tout en n’écartant pas d’imposer une présidence alternée entre les Chambres départementales. En outre, elle a avancé un argument juridique imparable : « En l’absence de dispositions spécifiques prévues par le législateur dans la partie législative du code du commerce, il apparaît difficile (…) de prévoir un siège itinérant ». Enfin, elle a fait ressortir que la Haute-Corse étant moins dotée en emplois publics et parapublics que la Corse du Sud, cela rendait souhaitable une nouvelle organisation territoriale dont l’implantation de la Chambre Régionale d’Industrie et de Commerce à Bastia et de la Haute-Corse pourrait être une des premières pierres. La deuxième raison révélant que l’option Bastia avait gagné du terrain, a été que les groupes politiques, excepté Corsica Libera qui avait unanimement choisi Corte, se révélaient « travaillés » par l’opposition Ajaccio / Bastia et qu’étant majoritaires, les nordistes avaient toutes chances d’être gagnants. Enfin, il est apparu que la concurrence affichée entre quatre élus majeurs de Bastia (Jean Zuccarelli, François Tatti, Emmanuelle de Gentili, Gilles Simeoni) poussait à un choix en faveur de cette ville.

Réaction trop tardive

Les élus consulaires sudistes ont tenté d’inverser la tendance. Mais trop tard. Le premier revers, annonçant le second à l’Assemblée de Corse, a été l’élection du nordiste Jean Dominici à la présidence de la Chambre Régionale d’Industrie et de Commerce, avec le soutien de tous les délégués de la Chambre de commerce et d’industrie de la Haute-Corse. Revers, car cette élection a été suivie de celle de Paul Trojani, adversaire déclaré du « siège tournant », à la présidence de la CCI de la Haute-Corse. Suite à ce casus belli et tenant compte des raisons de s’alarmer évoquées plus haut, Jacques Nacer, le président de la chambre sudiste, a tenté de réagir. Il a fait savoir que les sudistes rejetaient les recommandations de la commission mixte et, surtout, il a annoncé qu’il convenait de s’en remettre à la seule autorité de l’Etat. Mais le vote de l’Assemblée de Corse a rendu cette réaction bien vaine....

Pierre Corsi

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