La France n’est pas la seule à avoir une attitude compliquée par rapport aux Roms. L’Allemagne aussi, qui a inauguré à Berlin un mémorial aux Roms victimes du nazisme et ne sait pas gérer l’immigration massive de milliers de Roms à la recherche d’une vie meilleure en terre germanique. En Italie, les Roms sont exploités par la mafia, qui fait fructifier l’industrie de la pauvreté et de la précarité. La Hongrie a aussi quelques problèmes, ayant connu une mobilisation rom contre une manifestation d’extrême droite. L’Europe n’est pas une terre d’accueil pacifique à l’égard de ceux que l’on a tendance à confondre avec les gens du voyage. En la matière, la France a encore du chemin à faire.
Un pas vers la fin de la stigmatisation
Certains continuent à réclamer l’abrogation de la loi n°69-3 du 3 janvier 1969 relative à l’exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe, alors que le Conseil constitutionnel a partiellement abrogé cette loi en refusant le « carnet de circulation ». Les « Sages » ont également pris la décision de ramener de 3 ans à 6 mois l’obligation de résidence sur une commune en vue de s’inscrire sur les listes électorales, comme pour tout citoyen. C’est une première étape pour améliorer les conditions d’accueil des Roms et des gens du voyage. C’est loin de tout régler, tant cette population, entre de 15 à 20.000 personnes en France (hors Corse où il n’y a officiellement pas de campement) est régulièrement exposée pour son mode de vie. Les Roms sont en effet la plus grande minorité d’Europe à être confrontée à de graves situations d’exclusion et de précarité.
Expulsion et démantèlements de camps
Alors qu’il avait promis de ne pas démanteler de campements illégaux sans proposer de solutions de relogement, François Hollande a du mal à tenir son engagement. Les démantèlements de camps Roms se poursuivent. Evry, Créteil, Lyon, Haute-Savoie… À Marseille, une cinquantaine de Roms a été expulsée, à la suite d’une décision de justice. Mais les voisins des camps Roms n’attendent souvent pas l’intervention des autorités pour faire place nette à leur façon. Fin septembre, des habitants des quartiers Nord de Marseille ont délogé des Roms, sans attendre la police, mettant ensuite le feu au campement. Les Roms sont la cible d’agressions physiques permanentes. A Lille, dans les faubourgs sud, Porte d’Arras, les riverains en ont plus qu’assez du campement dans lequel s’entassent près de 800 personnes, dans des conditions d’insalubrité extrême. Une situation qui nécessiterait une urgence à agir. Selon un sondage pour Dimanche Ouest France, 83% des Français sont favorables au démantèlement des camps illégaux de Roms, même s’ils pensent aussi que cette méthode n’est pas efficace. Pourtant cela n’empêche pas de poursuivre les expulsions. Mais pas à n’importe quelles conditions.
Position politique
En septembre dernier, Manuel Valls a admis que « l’aide au retour avait incontestablement un certain nombre d’effets pervers ». Cette aide financière au retour volontaire dans leur pays d’origine représente 300 euros par adulte et 100 euros par enfant mineur. Elle est versée aux étrangers ayant la nationalité d’un État membre de l’Union européenne, comme les Roms, présents en France depuis plus de trois mois et en situation de dénuement ou de grande précarité, qu’ils soient en situation irrégulière ou non. Les ONG s’accordent à dire que le dispositif est inefficace et coûteux pour la France. Même son de cloche du côté de la Roumanie : « C’est juste de l’argent pour les vacances, de l’argent perdu pour le gouvernement français », a déclaré Danut Dumitru, coordinateur du Fonds d’éducation pour les Roms (REF). La question des Roms est un sujet d’ordre européen, c’est pourquoi le gouvernement est notamment en pourparler avec les autorités roumaines. L’ONU réclame des « efforts supplémentaires » à la France, pour que les démantèlements respectent les normes sur les droits de l’homme quant à la non-discrimination. Et faciliter l’accès au travail des Roms n’a pas été une mesure jugée suffisante. Hollande doit jouer sur du velours : rester ferme pour ne pas prêter le flan aux critiques de la droite, tout en amenant des mesures d’assouplissement qui tranquillisent son électorat. En attendant, le froid arrive. Y aura-t-il une trêve hivernale pour les camps de Roms ? La réponse se fait attendre.
Maria Mariana