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Rétrospective L’année 2010 en Corse

vendredi 7 janvier 2011, par Journal de la Corse

Retrospective

Entre le basculement à gauche de la Collectivité territoriale, la mobilisation pour le rapprochement des prisonniers corse détenus sur le continent, la dégradation des conditions de vie, la remise en question du schéma actuel de la continuité territoriale, tour d’horizon des événements qui ont marqué l’année 2010, rythmée également par des faits-divers.

Politique : une île en rose

L’événement majeur de cette année 2010 aura été l’accession de la gauche à la Collectivité territoriale après 26 ans de présence sans partage de la droite à la tête de la Corse. Paul Giacobbi a donc pris les rênes de l’île avec une majorité relative de 24 sièges à l’Assemblée territoriale pour quatre ans. Une courte mandature donc avec des sujets emblématiques à concrétiser comme la nouvelle mouture du Padduc, l’énergie, le traitement des déchets, les transports. L’hémicycle aura également la tâche de dessiner les contours d’une nouvelle organisation institutionnelle, de préparer l’agriculture insulaire moribonde à la réforme de la Politique agricole commune et d’expérimenter son pouvoir d’adaptation législative. Enfin, interpellée par l’omniprésence de la spéculation foncière et des difficultés rencontrées par les Corses pour accéder à la propriété comme à la location, la nouvelle équipe dirigeante a lancé les Assises du foncier et du logement à l’automne. Le renforcement de la présence des nationalistes sur l’échiquier politique régional est un autre phénomène marquant de l’année politique. Avec 35% des suffrages au second tour, la famille nationaliste s’est imposée comme une force politique incontournable. A côté, les dissensions au sein de la droite insulaire, déjà marquées lors de la campagne pour les élections territoriales et qui se sont traduites par un mauvais score, se sont renforcées avec l’émergence de deux clans. Une scission néfaste à l’approche des élections cantonales.

Transports : vers une nouvelle continuité territoriale

L’arrivée de la Moby-Line sur la ligne Toulon-Bastia à partir du 1er avril a suscité l’inquiétude des salariés des compagnies SNCM et CMN. Et provoqué une grève qui a paralysé l’île pendant plusieurs jours. Les rapports du sénateur Charles Revêt et de la Chambre régionale des comptes ont mis en évidence les déséquilibres de la continuité territoriale et la nécessité de revoir ce dispositif. Ce que s’est engagé à faire le Conseil exécutif avant même la fin de la convention prévue en 2011. Un grand débat a donc été organisé à l’Assemblée en novembre au cours duquel chacun a pu exprimer son point de vue. L’aide sociale aux passagers et le service complémentaire sont notamment dans la ligne de mire du conseiller exécutif en charge des transports, Paul-Marie Bartoli. Les pratiques sociales de la Corsica Ferries et de la Moby-Line ont été pointées du doigt par les représentants syndicaux de la CGT et du STC. La compagnie aérienne régionale n’a pas été épargnée non plus par les critiques. Un rapport de la Chambre régionale des comptes publié au printemps avait épinglé la CCM, rebaptisée Air Corsica, pour ses nombreux dysfonctionnements et incohérences. Une nouvelle organisation de la desserte aérienne et maritime devrait être soumise aux 51 conseillers territoriaux au premier trimestre.

Prisonniers corses : unanimité de la classe politique, mobilisation des associations

Une motion pour le rapprochement des détenus corses incarcérés sur le continent déposée par le groupe Corsica Libera et votée, amendée, à l’unanimité lors d’une session de l’Assemblée territoriale en mai a propulsé cette problématique sur le devant de la scène. Après cette prise de position ferme de l’ensemble de la classe politique et les blocages de l’aéroport d’Ajaccio et du port de Bastia fin août par l’association Sulidarità et la Car, un rendez-vous a été organisé entre la ministre de la Justice d’alors, Michèle Alliot-Marie et les principaux élus insulaires. Lors de cet entretien, le Garde des Sceaux a annoncé l’ouverture de vingt places supplémentaires à la prison de Borgo et la poursuite d’envoi de prisonniers corses. Ces mesures ont laissé sceptiques les nationalistes, les modérés comme les indépendantistes. La mobilisation de l’association Sulidarità et de la Car n’a pas faibli pour autant. Après un blocage symbolique de la gendarmerie de Montesoro, à Bastia, en octobre, elles ont annoncé une manifestation à Toulon fin janvier.

Violence : toujours plus de risques

Les faits-divers ont rythmé l’année 2010. Certes les règlements de compte ont diminué sur l’île, mais leur violence et les prises de risques ont frappé les esprits. La première victime de cette série de morts violentes a été à Ajaccio Joël de la Foata, assassiné dans une ruelle rejoignant la rue Fesch au marché un dimanche matin peur avant 8h. Ensuite, la mort d’Antoine Casanova, tué d’une seule balle dans la tête à la suite d’une bagarre lors d’une soirée étudiante à Corte a heurté les consciences. La circulation des armes, qui favorise le passage à l’acte, est un fléau qu’entend combattre la justice avec toujours plus d’intransigeance. Le passage à 2011 s’est d’ailleurs illustré par la blessure au bras et à l’abdomen par une balle perdue d’un jeune homme de 29 ans qui se trouvait sur son balcon à L’Île-Rousse. L’autre phénomène marquant de 2010 est la détermination des assassins à commettre leurs méfaits. A Sartène, en septembre, un maraîcher a été blessé lors d’une fusillade qui a fait un mort et un blessé grave, sur la place Porta très fréquentée en ce jour de marché. Le mois suivant, Antoine Niovaggioni a été tué sous les yeux de passants et d’adolescents qui se rendaient au collège et au lycée Fesch situés à une cinquantaine de mètres. Enfin, Florent Costa a été tué dans sa voiture, en présence des ses enfants âgés de 8 mois et 5 ans. Un débat a été consacré à la violence mi-décembre à l’Assemblée territoriale. Mais la marge de manœuvre des élus s’avère être quasiment nulle.

Social : une inquiétante paupérisation

Toujours plus de précarité. Voilà comment pourrait être hélas définie l’année qui s’est achevée. Les associations d’entraide, que ce soient les Resto du cœur, le Secours catholique ou populaire et toutes les structures de soutien aux démunis, ainsi que les Centres communaux d’action sociale dressent un constat unanime : la Corse se paupérise. Le nombre de bénéficiaires de paniers repas ou d’aides en tout genre est chaque année en augmentation. La pauvreté touche toutes les catégories de la société mais les personnes âgées sont les premières victimes de la dégradation des conditions sociales. Le nombre de demandeurs d’emplois a connu une hausse préoccupante de 11,5% en un an, les plus impactés étant les seniors. Si le tourisme a connu une saison satisfaisante et un allongement de l’activité, le BTP, deuxième secteur phare de l’économie insulaire, n’a pas créé d’emplois en 2010. Par ailleurs, les inégalités se sont accentuées : bas salaires, disparités des revenus entre le public et le privé, prédominance des contrats saisonniers sont quelques-uns des facteurs expliquant ces disparités.

M.K

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