Alors que jusqu’à présent les Corses bénéficiaient d’un régime d’exception en matière de succession pour les immeubles et droits immobiliers, celui-ci devrait prendre fin à partir de 2013. À cette date, les insulaires devront payer un impôt sur les héritages fonciers. Mais le casse-tête des héritages n’est pas qu’une particularité insulaire, puisqu’il existe des « chasseurs d’héritiers » dont la tache n’est autre que d’enquêter sur les milliers d’héritage en déshérence en France chaque année. Notaire recherche héritier désespérément…
Fin des arrêtés Miot
Les successions sont un véritable assommoir pour les notaires corses, d’autant que des spécialistes estiment que 4/5 des biens sur l’île ne sont pas identifiés. Jusqu’alors, les successions qui comportent des immeubles ou droits immobiliers en Corse bénéficiaient d’un régime fiscal de faveur destiné à encourager le règlement des indivisions successorales. Ô cruelles indivisions ! Objet de bien des histoires dans les familles, l’indivision était longtemps pointée comme le mal foncier de l’île. Tout cela en raison des fameux arrêtés Miot, qui étaient depuis 1801 la règle pour les droits de succession. Même si la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse avait neutralisé les dispositions de cet arrêté, celui-ci réglait toujours les successions ouvertes avant le 23 janvier 2002. Concrètement, la disparition complète du dernier arrêté Miot va intervenir progressivement. Jusqu’au 1er janvier 2018 et dans le cadre des successions qui auront été ouvertes entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017, les biens immobiliers situés en Corse ne seront taxés aux taux de droit commun que sur la base de 50% de leur valeur vénale. Après le 1er janvier 2018 ces mêmes biens immobiliers seront taxés aux taux de droit commun sur la base de leur entière valeur vénale.
Spécificités insulaires
Ce que signifie « leur entière valeur vénale » n’est autre que le prix résultant de l’offre et de la demande sur le marché. Ce qui est sous-jacent est « l’aliénation du patrimoine des Corses à travers leur dépossession foncière ». Parce que si revenir dans le droit commun en matière de succession pour les biens fonciers fait tant de bruit, c’est parce qu’il est possible que s’acquitter des droits de succession empêchent les Corses de jouir des biens dont ils ont hérité. En effet, avoir à payer les taxes pourrait conduire à revendre le bien. Et comme la base d’évaluation sera la valeur vénale du bien, cela laisse la porte ouverte à bien des spéculations. Pour aider les Corses à sortir de l’indivision, le Girtec (groupement d’intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse) avait été créé en 2006. Cet organisme est fortement décrié, accusé de spolier les Corses. Une accusation qui se base sur un retour d’expériences des propriétaires terriens situés en zone constructible de l’île de Ré, qui ont été obligés de vendre leur bien pour payer les taxes et autres impôts. Idem dans le Lubéron. Ces régions se vident de leurs habitants d’origine.
Diversités des cultures familiales
Le foncier révèle bien d’autres questions de société, comme les origines, connotée à la généalogie, qui prend toute son importance au moment de l’héritage. Certaines successions s’avèrent problématiques (absence d’héritier connu, remariage, disparition, enfants naturels), d’autant qu’à notre époque cela n’est pas si évident, avec les éclatements des familles, les divorces, remariages, concubinages, enfants hors mariage, la mobilité géographique... D’où l’intervention de généalogistes successoraux, qui travaillent avec les notaires, pour régler les successions en dehors des héritiers réservataires (enfants et conjoint), obligatoirement inclus dans la succession des biens. Leur travail consiste à établir les filiations et à retrouver les ayants droit. Ils remontent jusqu’au 6e degré, c’est-à-dire jusqu’aux cousins germains ayant eu des enfants qui en ont eux-mêmes engendré. Au-delà du 6e degré de succession, l’héritage revient à l’État. L’État « hérite » aussi de l’intégralité des biens du défunt s’il n’y a pas de testament ou de parent connu. Chaque année, plus de 10.000 personnes décèdent sans parent connu ni testament. Alors avant de flirter avec la mort, mieux vaut faire connaître ses dernières volontés, et ne pas trop laisser traîner de cadavres dans les placards !
Maria Mariana