Sept ans après la loi Leonetti sur les droits des malades en fin de vie, bien des interrogations demeurent. Des exemples très médiatisés, comme celui de Vincent Humbert et de Chantal Sébire, viennent régulièrement mettre le sujet au goût du jour, idem pour le film « Quelques heures de printemps ». Cette discussion figurait parmi les 60 engagements de François Hollande, alors candidat, qui a lancé une mission sur cette question de la fin de vie. Le débat reste ouvert.
Débat citoyen
Le premier débat public sur la fin de vie s’est tenu le samedi 22 septembre 2012 à Strasbourg, réunissant 150 personnes sur ce sujet très controversé. Cet été, François Hollande a confié au professeur Didier Sicard, une mission de réflexion sur la fin de vie. La réunion publique de Strasbourg marquait dont le début d’une « tournée » nationale de huit rendez-vous pour discuter de ce sujet. Le rapport du professeur Didier Sicard est attendu pour le 22 décembre. Les députés radicaux de gauche ont d’ailleurs proposé une loi, qui sera à l’ordre du jour en mars 2013. Jean Leonetti, ancien ministre auteur de la loi du 22 avril 2005, toujours député, reconnaît que sa « loi pouvait être améliorée, notamment sur les contraintes à opposer au patient qui a exprimé des souhaits et ses volontés. Toute vie mérite d’être vécue mais il y a des cas extrêmes. On peut légitimement se demander si une vie sans relation, sans conscience et sans espoir d’amélioration quelconque, sur un lit, avec un corps qui se délite est effectivement une vie, sans même parler des conséquences que cela comporte pour l’entourage ».
Loi et droit
En 2011, plus d’un Français sur deux meurt à l’hôpital. Dans ce contexte, le corps médical est régulièrement confronté à la mort. Autant dire que les médecins font partie des premiers exposés à cette proposition de loi pour un droit de mourir médicalement assisté. À tel point que l’ordre national des médecins a publié un fascicule sur « le malade en fin de vie », rappelant les grands principes du droit, et le cadre de la mise en œuvre des soins palliatifs. Aujourd’hui, si l’euthanasie active reste illégale, la loi Leonetti a autorisé le médecin à appliquer au patient « un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie », autrement dit cette loi reconnaît le droit de laisser mourir par l’arrêt des soins. Le droit de mourir médicalement assisté doit être strictement encadré, mais l’impératif doit se fonder sur le droit des patients à disposer d’eux-mêmes. Les exemples très médiatisés de Vincent Humbert et Chantal Sébire laissent ouvert la question des cas exceptionnels où il devrait être possible d’obtenir une assistance médicalisée pour avoir le droit de mourir dans la dignité, dans les meilleures conditions possibles.
Mourir dans la dignité
Le débat confronte les opposants à l’euthanasie ou suicide assisté et ceux qui militent pour le droit à mourir dans la dignité. Une association existe (AMDM, Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité), qui occupe le terrain pour que le débat ne doit pas enterré. La délégation de l’AMDM en Corse est tenue par Robert Cohen à Ajaccio. Une autre association sur la fin de vie et le deuil en Corse, LEA V.I.E (vivre, informer, espérer), vise à soutenir les parents suite aux décès d’un enfant, les écouter, et les aider dans leurs démarches administratives. Parce que les questions de l’accompagnement touchent autant le mourant que ses proches. Ainsi demeurent les questions de la durée de l’accompagnement (accompagner jusqu’au bout ?), les moyens de reconnaître et respecter les attentes, les demandes et les droits des personnes en fin de vie, la place de la famille et de l’entourage dans la démarche d’accompagnement en institution et à domicile, et les questions pratiques et éthiques liées à cet accompagnement. Le débat nourrit beaucoup de questions et alimente les contradictions plus qu’il n’apporte de réponses et de certitudes, tant les interrogations et les doutes demeurent sur la conscience réelle du patient. Le débat est complexe et divise depuis longtemps. Soit on respecte l’esprit de la législation française, qui vise à éviter « l’obstination déraisonnable » et les situations inextricables dans le cadre médical ou bien on ouvre un droit à la mort assistée, fondée sur la volonté libre et éclairée de chacun. Une frontière, un conflit de valeurs entre « éthique de la vulnérabilité » et « éthique de l’autonomie ».
Maria Mariana