Entre émotion et incompréhension
Le procureur Etienne Perrin a requis six mois de prison avec sursis contre l’urologue Bao Le Thaï, l’anesthésiste Marc Mathis et le gynécologue Roger Tomasini pour homicide involontaire contre Carine Acquaviva lors du procès qui s’est déroulé le vendredi 21 janvier devant le tribunal correctionnel d’Ajaccio. Un réquisitoire qui laisse la famille de la victime sur sa faim...
"Nous voulons connaître la vérité". C’est ainsi que Pierre Acquaviva a commenté l’ouverture du procès des trois médecins qui comparaissaient pour homicide involontaire, le 20 janvier dernier, devant le tribunal correctionnel d’Ajaccio. Le procès s’est déroulé dans une salle comble. Et il convient de souligner que la famille Acquaviva, toute comme les trois médecins prévenus, est bien connue dans la cité impériale. Pour tout dire, le décès de Carine Acquaviva, le 2 octobre 2006, à l’hôpital d’Ajaccio a bouleversé la population de la cité impériale. Un heureux événement qui tourne au drame. Et quelque part, ce drame est le nôtre. Nous sommes tous le frère, la mère, l’époux ou le père de Carine et c’est en cela que les Ajacciens ont été touchés par cette immense tragédie.
Un premier rapport d’experts accablant
D’un côté, une famille meurtrie dans sa chair en quête de vérité mais d’une dignité exemplaire durant tout le procès et dans ses commentaires. Une famille qui s’est abstenue de manifester autrement que par la régularisation d’une partie civile, le ressentiment bien légitime qui les a habités, à l’encontre de ceux qui ont concouru à la réalisation de cette tragédie. Une famille qui, aujourd’hui encore, veut légitimement savoir, bien au delà des discours et analyses, parfois "pompeux" du corps médical ce qui s’est passé le 2 octobre 2006. Et elle a le droit de savoir comment et pourquoi Carine Acquaviva leur a été ravie ce jour-là. Une première depuis trente ans au centre hospitalier de la Miséricorde. Un établissement et surtout un corps médical que l’on pensait à l’abri d’une telle tragédie. De l’autre, trois médecins campant sur leurs positions, réfutant les accusations, revenant même sur leurs déclarations initiales. "Je n’ai pas la même interprétation des faits. Je n’ai commis aucune maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement a précisé le docteur Le Thaï lors d’une première comparution devant le magistrat instructeur. Pourtant, il y a malheureusement eu une erreur puisque Carine Acquaviva est décédée des suites de cet accouchement. Pour le professeur Hartig expert près la cour de cassation et président d’un premier collège d’experts, il est évident que "tout a dysfonctionné. Il ressort que les trois médecins du centre hospitalier d’Ajaccio, les docteurs Le Thaï, Tomasini et Mathis peuvent être mis en cause concernant le décès de madame Acquaviva pour des fautes techniques et un défaut de diagnostic adapté à l’état de santé de la patiente." Experts et médecins se sont succédé à la barre. Certains pour infirmer ou confirmer les conclusions du premier collège, d’autres pour soutenir les trois prévenus, Bao Le Thaï, Roger Tomasini et Marc Mathis. À l’arrivée, les six mois de prison avec sursis requis par le Procureur Etienne Perrin sont loin de satisfaire la famille de Carine Acquaviva. Elle aurait souhaité que les trois médecins assument leur responsabilité dans cette affaire et surtout les voir frappés d’une interdiction d’exercer, fût-elle provisoire."Nous attendions de la justice, reprend Pierre Acquaviva, qu’elle fasse la part des choses, en toute impartialité mais qu’elle mette en évidence que ces médecins n’ont pas été à la hauteur." Le jugement sera prononcé en délibéré le 16 mars prochain. Quant à la quête de vérité de la famille Acquaviva, elle reste encore inassouvie...
Ph.P.