Le système judiciaire français est mal noté. Faiblesse de moyens, défaut de ressources, longueurs des procédures, lourdeurs du système… La France n’est donc pas à l’honneur en matière judiciaire dans le rapport de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (Cepej), organisme indépendant du Conseil de l’Europe. Autant dire que la balance a dû mal à garder son équilibre.
Un nouveau visage en 2012
Depuis le 1er janvier, l’organisation judiciaire a quelques nouveautés, dont la présence de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels de Dijon et Toulouse, ainsi que la création d’un tribunal correctionnel pour mineur pour les délinquants récidivistes de plus de 16 ans qui encourent une peine supérieure à trois ans, et la nécessité de motiver les arrêts d’assises. Depuis un nouveau gouvernement est arrivé au pouvoir et a gelé l’expérimentation des citoyens assesseurs. Le 11 juin, l’extension à huit régions supplémentaires (Douai, Lyon, Bordeaux, Colmar, Angers, Orléans, Montpellier et Fort-de-France), prévue en janvier 2013, de l’expérimentation des jurés populaires dans les tribunaux correctionnels a été officiellement arrêtée, « du fait du défaut de bilan complet de l’expérimentation en cours ». Cette réforme était emblématique de la présidence de Nicolas Sarkozy. Elle prévoyait que deux « citoyens assesseurs » siègent aux côtés de trois magistrats, en première instance et en appel, pour le jugement de certains délits passibles d’au moins cinq ans de prison. L’actuelle ministre de la Justice, Christiane Taubira, a souhaité qu’un réel bilan de cette expérimentation soit établi à la fin de l’année en cours avant de décider de la suite.
Des projets et des actes
Dans son programme, François Hollande avait des projets pour réformer le système judiciaire. Il souhaitait doubler le nombre de centres éducatifs fermés pour les mineurs condamnés par la justice, réformer le Conseil supérieur de la magistrature, remettre à plat la procédure pénale et créer, chaque année, 1.000 postes supplémentaires pour la justice, la police et la gendarmerie. La sécurité était également au cœur du programme, avec la mise en œuvre d’une nouvelle sécurité de proximité assurée par la police dans les quartiers et la gendarmerie dans les territoires ruraux, la création de zones de sécurité prioritaires où seront concentrés davantage de moyens – Manuel Vals, ministre de l’Intérieur, a annoncé la création de quinze zones de sécurité prioritaire dans tout le pays (la Corse ne figure pas dans le palmarès retenu) –, la lutte contre le délit de faciès dans les contrôles d’identité – copie à revoir car abandon de la mise en place du récépissé remis à chaque contrôle d’identité. Concernant la prévention et les droits de victimes, il s’agit de rétablir la présence régulière des services de police au contact des habitants et de garantir l’accès à la justice de proximité pour tous les litiges portant sur des aspects essentiels de la vie quotidienne des Français. Autres promesses électorales portant cette fois sur l’exécution des peines : garantir l’exécution effective de toutes les peines prononcées, renforcer la sécurité et les droits des victimes. À voir comment les choses tournent, mettre en œuvre toutes ces belles paroles pour réformer la justice risque de prendre un peu plus de temps que prévu.
Justice parent pauvre
Selon le quatrième rapport de la Cepej, le point noir de la France en matière de justice reste le budget. L’objectif du rapport, pour Stéphane Leyenberger, secrétaire de la Cepej, est de « donner aux décideurs politiques des outils afin d’orienter les nécessaires réformes des systèmes judiciaires et en améliorer la qualité ». Ainsi en France, même si le budget dévolu à la Justice reste important, avec 7,5 milliards d’euros, il est insuffisant pour financer à la fois le système judiciaire et les prisons. En France, la justice (tribunaux, ministère public, aide judiciaire) représente 60,5 euros par habitant. Le budget consacré aux prisons est supérieur à celui dévolu aux tribunaux. Côté nombre de magistrats, la France a 10,7 juges du siège pour 100.000 habitants, mais manque de procureurs (3 procureurs pour 100.000 habitants). Les questionnements habituels sur la justice demeurent : avenir du juge d’instruction, impasse du système carcéral, aménagement des peines… La crise est donc grave côté ministère public.
Maria Mariana