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POLITIQUE

mardi 22 mars 2011, par Journal de la Corse

Dominique domarchi

Cantonales : épilogue tragique et dynastie chancelante

L’assassinat de Dominique Domarchi et la fin de la toute-puissance des Rocca-Serra auront marqué le premier tour des cantonales.

Depuis plus de douze ans, en tant que chargé de mission affecté au cabinet de la présidence du Conseil général de Haute-Corse, Dominique Domarchi était au service de Paul Giacobbi. Jour et nuit, avec son alter ego Dominique Viola, celui qui était aussi le maire de Sant’Andria di u Cotone, captait et traitait les attentes, les demandes et les besoins des élus du moindre petit village, sachant les évaluer à l’aune de l’intérêt général, des sollicitations clientélistes, des considérations électorales ou des ambitions plus ou moins déclarées. Depuis un an, Paul Giacobbi ayant conquis la présidence du Conseil exécutif de Corse, Dominique Domarchi était aussi présent à Ajaccio. Homme de terrain et conseiller aussi dévoué qu’écouté, il méritait d’être qualifié « d’homme du Président ». Sa disparition tragique durant la nuit ayant suivi le premier tour des cantonales, va causer une vide certain dans le dispositif politique et électoral qui asseyait l’influence et le pouvoir de Paul Giacobbi.

« Toutes les pistes restent ouvertes »

Survenu en plein contexte électoral, sur fond « d’affaires » ayant affecté le Conseil général et dans une période marquée par de nombreux assassinats relevant du règlement de compte, l’assassinat de Dominique Domarchi jette le trouble. D’autant que l’intéressé avait récemment été entendu dans le cadre de « l’affaire » ayant conduit à la mise en examen pour détournement de fonds publics et à l’incarcération de Pierre Olmeta, le directeur départemental des interventions sanitaires et sociales de Haute-Corse. Toutefois, rien ne permet de relier ce contexte à la mort tragique de Dominique Domarchi. Le procureur de la République de Bastia l’a d’ailleurs souligné en précisant que « toutes les pistes restent ouvertes ». Mais au fond, peu importe. L’essentiel n’est pas de savoir pour quel mobile un élu, un homme défavorablement connu des services de police ou un citoyen lambda est tué. Ce qui prime, c’est de se rendre une bonne fois à l’évidence que, dans cette île, il existe une tendance lourde à considérer que la vie humaine ne vaut rien et que l’homicide est devenu un mode commun, encore trop souvent impuni ou réprouvé, de résolution des conflits. En revanche, ce qui est primordial, c’est d’admettre que les débats sur la violence et autres condamnations convenues des crimes les plus sanglants, ne sont que des cache-misères visant à se donner politiquement et collectivement bonne conscience. Rapportée à la population de l’île, l’addition de crimes commis ces dernières années, de victimes déplorées et de tueurs présumés en cavale, en détention ou condamnés, laisse en effet penser que le crime de sang est ancré dans la réalité sociale comme une réalité trop tolérée. Et ce ne sont pas les morbides attirances pour les créations à base de scenarii maffieux qui contribueront à me faire changer d’avis ! Il serait grand temps que les uns et les autres, dans cette île, fassent une croix sur un passé mythifié insérant dans un même Panthéon, les authentiques criminels qu’étaient la plupart des « bandits d’honneur » et les véritables truands qu’étaient les voyous corses qui faisaient carrière en dehors de l’île. Il est d’autres héros et d’autres réussites sociales à livrer en référence à nos adolescents et à nos enfants.

Majorité départementale solide en Haute-Corse

Son épilogue tragique aura masqué quelques enseignements du premier tour des élections cantonales. On retiendra qu’en Haute-Corse, la majorité départementale peu dormir sur ses deux oreilles. Les candidats s’en réclamant ou en faisant partie l’ont emporté haut la main ou sont en situation de le faire au second tour. Ainsi Hyacinthe Mattei (LIle-Rousse), Pierre Mancini (Belgodère) Jacques Costa (Castifao-Morosaglia), Pierre Ghionga (Corte), François Orlandi (Capo Bianco), Pierre-Louis Nicolaï (Campoloro-Moriani), Jean-Jacques Vendasi (Bastia III) et Michel Mezzadri (Venaco) ont été réélus. Par ailleurs, la majorité départementale a déjà conquis un canton (dans lAlto di Casaconi, Jean-Marie Vecchioni a étrillé le sortant divers droite). Il n’a manqué que quelques voix à Ange-Pierre Vivoni, le maire de Sisco, qui se présentait dans le canton de Sagro di Santa Giulia avec le soutien du sortant Jean Motroni. Enfin, concernant le canton de Prunelli di Fium’orbu, l’issue du duel entre le sortant François Tiberi et le prétendant Pierre Siméon de Buochberg n’enlèvera rien à la majorité départementale.

Fin de règne dans le sud

En Corse-du-Sud, la majorité départementale devrait s’en tirer. En revanche, elle est sur la défensive. Elle pourrait en effet enregistrer la perte de trois sièges au soir du second tour (Bonifacio, Ajaccio III, Porto-Vecchio). A Bonifacio, c’est déjà perdu, Ati Lantieri (Divers droite) ne se représentant pas, Claude Degott-Serafino (Divers gauche) a battu André Quéré (UMP). A Ajaccio III, où le sortant divers droite Pierre Santoni est d’ores et déjà battu et éliminé, les dissensions à droite pourraient bien faire le jeu du candidat de gauche François Casasoprana. Mais le canton vers lequel tous les regards se tourneront dimanche 27 mars, sera celui de Porto-Vecchio. A l’issue du premier tour, Jean-Christophe Angelini y est arrivé en tête avec 45 % des votes devant Camille de Rocca-Serra, crédité de 40 %. 395 voix séparent les deux candidats. Si le candidat autonomiste l’emporte, Porto-Vecchio et la Corse vivront la fin d’une dynastie et peut-être le début d’un processus qui verra tomber les grandes familles ayant marqué la vie politique de l’île depuis plus d’un siècle.

Pierre Corsi

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