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PADDUC : la méthode Maria

jeudi 12 juillet 2012, par Journal de la Corse

A des aspirations populaires empreintes de maturité, Maria Giudicelli apporte des réponses d’une rare qualité.

Dans le cadre de l’élaboration du PADDUC, la Collectivité Territoriale a commandé une enquête d’opinion concernant les attentes des Corses. Les premières indications récemment livrées à Corse-Matin par Maria Giudicelli, la conseillère exécutive en charge du dossier, font apparaître une Corse dont les priorités sont, somme toute, raisonnables et équilibrées. Les personnes ayant répondu sont essentiellement préoccupées par des problématiques personnelles et quotidiennes : la santé, le cadre de vie, les transports, l’accession au logement… Mais elles ne sont pas pour autant individualistes. Elles se révèlent sensibles au besoin d’équipements collectifs, à la préservation de l’environnement et plus globalement au développement durable. Elles sont nombreuses à juger essentielle l’amélioration du réseau routier et des infrastructures liées à l’eau et à l’assainissement, et à souhaiter qu’un effort significatif soit consenti en faveur des territoires ruraux. Une forte majorité d’entre-elles demande aussi que les terres agricoles soient protégées de la pression immobilière, et qu’une régulation publique s’oppose à un accaparement de cette ressource foncière par la promotion immobilière. Enfin, une forte proportion de réponses indique une aspiration à la valorisation de l’identité culturelle corse. A cette demande empreinte de maturité, la conseillère exécutive répond par des commentaires et des préconisations d’une rare qualité. En effet, les pistes d’élaboration du PADDUC qu’elle suggère, allient l’écoute, le réalisme et le pragmatisme qui font trop souvent défaut à la classe politique, et bien plus encore aux élites ou exemplarités autoproclamées qui inondent le champ médiatique insulaire de solutions empreintes de radicalité, d’idéologie ou de démagogie.

Refus des schémas idéels

Maria Giudicelli ne condamne pas en bloc la production immobilière. Elle préconise de la réguler en créant les conditions d’une densification de la construction et d’un équilibre de la proportion résidences principales/résidences secondaires. Elle défend la qualité du cadre de vie en s’inspirant des besoins concrets exprimés par les habitants et non de schémas idéels. Elle propose de structurer les zones urbaines en y apportant du logement social, des circulations et des espaces publics, des activités économiques, culturelles et ludiques de proximité, des services publics. Elle imagine une revitalisation des territoires ruraux non pas en se référant à un mythique attachement à la terre, au village ou au passé, mais en considérant les demandes de nature préservée, de convivialité et de modernité. Elle dessine une ruralité d’aujourd’hui qui valoriserait ses potentialités de création d’emplois, d’habitat et de valeur ajoutée culturelle, et dont les habitants disposeraient de la modernité et des commodités que représente le maillage d’équipements collectifs, de services publics et d’activités économiques et associatives. Enfin, elle préconise une amélioration et un développement des transports en commun non pas en invoquant l’écologie, mais en considérant le besoin de chacun de se déplacer dans des conditions satisfaisantes de sécurité, de coûts et de temps de trajet. On retiendra aussi que Maria Giudicelli n’exclut pas un recours à des adaptations réglementaires et législatives, en particulier pour mettre en œuvre une fiscalité corrective susceptible de favoriser l’investissement productif. On n’oubliera pas non plus que la conseillère exécutive ne s’interdit pas, une fois qu’auront été prises en compte leurs principales préoccupations, de sensibiliser les populations à des questions dont elles n’ont pas encore perçu le caractère vital : préserver les ressources naturelles, assurer l’autonomie alimentaire et énergétique, développer une économie de la connaissance.

Refus du populisme

La méthode Maria tranche vraiment. Elle laisse apparaître une conception de l’action publique qui tout en étant respectueuse de la volonté populaire, se refuse au populisme. Ainsi, la conseillère exécutive n’affiche pas une vision idéologique moraliste ou élitiste du PADDUC. En effet, elle se garde de stigmatiser des comportements ou d’avancer des solutions toutes faites. Sa démarche semble plutôt inspirée par la prise en compte des besoins exprimés par les populations et le souci d’apporter des solutions à la fois concrètes et compatibles avec les exigences du développement durable. Par ailleurs, elle ne tombe pas dans les travers maximalistes. Elle ne se présente pas en pourfendeuse d’une promotion immobilière dont les excès de certains ne sauraient faire oublier qu’elle contribue à la création d’emplois et de richesses. Elle n’adopte pas des postures indignées, écologistes ou identitaires. Enfin, elle n’instrumentalise pas la nécessité de recourir à des adaptations réglementaires et législatives. Mais, tout cela ne l’empêche pas de laisser percer des convictions fortes : opposition à une overdose de résidences secondaires, volonté de cohésion sociale, attachement à la culture corse… Après les récents épisodes électoraux marqués par les idées simplistes de l’extrémisme, les formules creuses de l’opportunisme et les exordes du populisme, le discours de Maria Giudicelli réintroduit du sens et de l’éthique dans le landerneau politique insulaire.

Pierre Corsi

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