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Ne nous laissons pas voler Napoléon !

jeudi 8 mars 2012, par Journal de la Corse

Une grande majorité de touristes, que cela plaise ou non, préfèrera toujours Tino et Napo d’Ajaccio à Ghjuvan-Francescu di Tagliu et Pasquale di Merusaglia.

Je n’en crois pas mes yeux, je viens de lire que la Seine-et-Marne pourrait accueillir, dans les années qui viennent, un parc de loisirs dédié à Napoléon. Ce concept a germé dans la tête d’Yves Jégo, le député-maire de Montereau. Il a eu pour origine la célébration, par cette ville, de la bataille de Montereau remporté par L’Empereur face aux Autrichiens, le 18 février 1814, durant la campagne de France et peu avant les adieux de Fontainebleau. Selon Yves Jégo, Napoléon est admiré partout dans le monde et plus encore dans les pays qui l’ont le plus combattu, à savoir la Grande-Bretagne et la Russie. Le pari serait d’attirer environ 2 millions de visiteurs par an. 3000 emplois directs et indirects pourraient être créés si le parc voit le jour. Le projet paraît sérieux. Il est soutenu par le secrétaire d’Etat au Tourisme, le directeur général d’Atout France et le Prince Charles Napoléon, descendant d’un des frères de l’Empereur. Il est toutefois loin d’être financé. Il manque l’apport de 250 millions d’euros. Des investisseurs asiatiques et du Moyen-Orient sont pressentis pour participer au tour de table. Yves Jégo envisage de créer un parcours qui, sur un espace de 100 hectares, évoquerait les temps forts de l’épopée napoléonienne, avec bien entendu la reconstitution des batailles les plus célèbres. Il propose aussi que tout cela soit en grande partie conçu à partir de nouvelles technologies. Certes, interrogé concernant ce projet, le directeur général du parc du Puy-du-Fou a exprimé un avis mitigé. La conjoncture se prêterait mal à créer un parc d’attraction estime-t-il. Il a néanmoins jugé porteuse la thématique napoléonienne.

Tonton et le filon

Ma surprise n’est pas qu’un élu continental ait imaginé ce projet. Pour moi, le plus étonnant est que nul n’ait dans notre île ait un jour eu ou défendu cette idée. Napoléon est né chez nous. Il appartient à notre patrimoine historique. Les lieux où il a vécu ou séjourné sont les plus prisés par les visiteurs. Cela vaut dans l’île mais également à l’extérieur. Il suffit de se déplacer hors de Corse, pour constater combien toute évocation de sa résidence ou de son passage en un lieu fait vendre. A Paris, ses bustes sont omniprésents dans les boutiques de souvenir proches du Louvre et des Tuileries. Il en de même à Fontainebleau et dans d’autres cités. L’ile d’Elbe en tire de son attractivité touristique. Il est même des « pèlerins » pour se rendre sur l’île de Sainte-Hélène. Et dans tous ces lieux qui vivent du souvenir impérial, la personnalité et l’action en partie contestables du grand homme sont laissées au placard. Business is business exige que l’on ne retienne que l’épopée revisitée par Las Cases. Il n’est que chez nous que l’on fait dans le scrupule. Parfois, il semble même que Napoléon gêne. On se contente de bénéficier de sa notoriété mais sans plus. Au lieu d’exploiter un filon, on se contente de jouer aux orpailleurs. Alors, à l’heure où l’on se creuse les méninges pour attirer les touristes dont une grande majorité, que cela plaise ou non, préfèrera toujours Tino et Napo d’Ajaccio à Ghjuvan-Francescu di Tagliu et Pasquale di Merusaglia, réagissons ! Empressons nous de vérifier que l’idée venue de Montereau est bonne et, si c’est le cas, empressons de la voler. Que le maire d’Ajaccio, si la gauche l’emporte, demande au nouveau secrétaire d’Etat et au Prince Charles Napoléon (très en cours au PS), de tourner les yeux vers chez nous et non plus vers les plaines de la Brie. Tonton, ne laisse pas filer le filon !

Alexandra Sereni

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