On peut se marier pour diverses logiques, d’amour, d’intérêt, de raison et le choix du conjoint est guidé par tout autant de mobiles, conduisant parfois à cette mixité, qui peut paraître suspecte. Lorsqu’il s’agit d’une alliance entre deux individus de nationalités différentes, le mariage est alors transnational, la mixité n’étant pas qu’une question de citoyenneté, on peut aussi se marier hors sa religion ou son ethnie. Tout un programme qui a l’heur de ne pas plaire à tout le monde. Avant de convoler en justes noces, les tourtereaux auront à montrer pattes blanches pour que le mariage ne soit ni blanc, ni gris.
Vagues d’immigration
La Corse est la seconde région de France, après l’Île-de-France, en matière d’immigration, avec une particularité insulaire dans la mesure où la moitié des personnes immigrées sont originaires du Maroc. Cela tient en partie à l’arrivée massive de rapatriés d’Afrique du Nord en Corse entre 1957 et 1965. Autre caractéristique régionale, la Corse n’étant pas très industrialisée, contrairement aux autres régions françaises d’immigration, un grand nombre des personnes étrangères travaillent dans les secteurs du bâtiment ou de l’agriculture. L’accueil réservé à cette population est plutôt mitigé, donnant lieu à des appellations comme « Arabi » ou « Maghrébins », mais les Portugais et les Italiens ne sont pas mieux lotis, même si ces derniers sont jugés plus « légitimes et naturels », sauf qu’ils n’ont pas la même visibilité et sont donc moins physiquement immédiatement rejetés, avec les vagues de racisme que l’on a vu déferler ou que certains vivent parfois au quotidien. Dans ce contexte, nulle surprise à ce que les mariages mixtes soient si socialement compliqués à assumer, avec en plus une peur démographique de voir disparaître le « peuple corse », comme un menace d’invasion permanente et d’absorption culturelle.
Unions sacrées
Pourtant, depuis longtemps, les mariages mixtes sont considérés en France comme un signe d’intégration. La France compte d’ailleurs presque 30% de mariages mixtes. Mais plus de la moitié de ces unions sont contractées à l’étranger. En effet, phénomène nouveau lié à la deuxième génération des immigrés, des Français d’origine étrangère retournent se marier au pays de leurs parents. Ainsi, en 2009, le ministère de l’Immigration a compté quelque 84.000 mariages mixtes, dont 48.500 ont été contractés à l’étranger. Il faut dire que l’union libre ne permet pas d’obtenir un permis de séjour, donc se marier est une obligation pour vivre en France. Toujours selon les chiffres du ministère des Affaires étrangères, quelque 60% de ces unions ont été enregistrées par les consulats du Maghreb, des pays d’Afrique francophone et en Turquie. D’où la suspicion des autorités de déceler dans ces unions une stratégie d’immigration plus qu’un vœu d’amour ou de respect des traditions. Pourtant, une étude de 2006 montre que seulement 0,45% des mariages mixtes (sur un an) ont été annulés par la justice, et peuvent donc être considérés comme des mariages blancs.
Stratégies nuptiales
Ces inquiétudes expliquent pourquoi les responsables de l’immigration avaient renforcé les contrôles en 2007 pour éviter les mariages forcés et d’éventuelles arnaques aux papiers. Ce repli communautaire n’est pas sans poser des problèmes sociaux. Mais les mariages mixtes ne sont pas l’apanage des populations d’immigrées. On note aussi que les échanges interuniversitaires par le biais de programmes européens type Erasmus favorisent les mariages hors territoire. Ainsi, un quart des mariages mixtes sont-ils contractés entre Européens. Vienne ensuite les Franco-Africains et les Franco-Maghrébins. Dans la mesure où sur le territoire, un jeune majeur sur cinq compte un parent étranger, la norme endogame ne semble plus être dominante. Pourtant, malgré les évolutions de la société, lorsque l’on est français, ou française, se marier hors sa nationalité relève de la course d’obstacles. Dédale de procédures, enquêtes intrusives et interrogatoires intimes... Les intentions matrimoniales doivent être avérées. N’en déplaise à Cupidon et au nouveau président, qui avait promis une simplification des formalités pour les français souhaitant se marier avec une personne de nationalité étrangère. À condition que la relation soit véritable. Ensuite seulement peut résonner la marche nuptiale.
Maria Mariana