Les élections municipales et provinciales de dimanche ont bousculé la carte politique espagnole. En Catalogne, le parti autonomiste de centre-droit l’emporte largement mettant à mal les partis traditionnels de gauche et de droite. Mais le plus étonnant s’est passé au Pays Basque. La rupture des nationalistes radicaux avec la violence etarra a provoqué un afflux électoral en sa faveur. Le Bildu, autorisé à se présenter peu de temps avant les élections est arrivé en tête dans la province du Guipuzcoa.
Les nationalistes première force au pays basque
La présence de la gauche abertzale, dont la première interdiction remontait à 2002 alors qu’elle avalisait encore la violence etarra, est désormais une réalité démocratique incontournable. Les nationalistes sont sans la principale force de la communauté autonome d’Euskadi, et seule l’obstination criminelle d’ETA a empêché la victoire aujourd’hui constatée. Le Bildu, recomposition de Herri Batasuna, n’avait acquis l’autorisation de se présenter donnée par Tribunal constitutionnel) à une voix près. Bildu est en tête à San Sebastian et dans la Diputación du Guipuzcoa. Là le Parti nationaliste basque (PNV) et le Bildu peuvent diriger la province à la condition de bien vouloir s’entendre. A Bilbao, c’est le PNV qui peut gouverner sans appui. Il est vrai que la gestion du parti nationaliste modéré a été irréprochable et Bilbao, fortement endettée avant l’arrivée au pouvoir du PNV, ne doit plus rien à personne. La Diputación de Biscaye, bastion du Parti nationaliste basque, reste elle aussi dans ses mains.
Une timide avancée de la droite
Le Bildu a totalité 313 231 voix et 1 138 élus devenant ainsi la deuxième force politique du pays basque. Les nationalistes ont à l’évidence bénéficié du rejet des socialistes sensible dans le pays tout entier. Les jeunes qui occupent désormais la rue, à l’instar des révolutionnaires arabes, ont provoqué un déport d’une partie de l’électorat vers les « forces nouvelles ». Enfin la rupture des nationalistes radicaux avec la violence etarra a fait le reste. Il faut cependant nuancer ce point particulier puisque le parti Aralar a quasiment disparu. Or il s’était créé il y a une dizaine d’années en se séparant de Batasuna justement sur le problème de la violence etarra. Cela ne doit pas faire oublier que le rejet des socialistes a provoqué, par réactions une progression de la droite et notamment du Parti populaire.
Les leçons des élections
Le pays basque et la Catalogne sont les provinces les plus riches de l’ensemble espagnol. Cela donne aux nationalistes locaux une marge de manœuvre dont ils usent parfois avec égoïsme oubliant les provinces méridionales qui concentrent souvent la pauvreté et les problèmes. La deuxième leçon est que pour l’heure, les nationalismes apparaissent à des franges très larges des populations locales comme un recours possible aux conséquences de la crise. Ainsi en Catalogne et au Pays Basque, la bourgeoisie locale a pris fait et cause depuis un siècle pour une forme d’autonomie voir de séparatisme. Reste à savoir si les solutions locales constitueront une véritable solution à une crise mondiale. Car s’il s’avérait que tel n’était pas le cas, alors les électeurs pourraient bien faire payer très cher aux courants nationalistes leur désillusion. Mais la bonne nouvelle est que Pello Urizar, porte-parole de Bildu, interviewé hier par Radio Euskadi, estimait que les résultats obtenus par sa coalition « impliquaient le retrait définitif d’ETA ».
Gabriel Xavier Culioli