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Le printemps des étudiants du Québec

jeudi 7 juin 2012, par Journal de la Corse

Mars 2011 Le gouvernement québécois annonce son intention d’augmenter les frais de scolarité. D’ici à 2017, les droits d’inscription doivent passer de près de 1.700 euros par an à quelque 3.000 euros.

Août 2011 Les étudiants commencent à se mobiliser.

13 février 2012 Les associations étudiantes votent la grève générale illimitée.

22 mars 200 000 personnes défilent à Montréal

27 avril Le Premier ministre, Jean Charest, propose d’étaler la hausse des droits de scolarité sur sept ans au lieu de cinq.

Début mai Un nouveau projet d’accord avorte, la mobilisation se poursuit.

18 mai 2012 Le Parlement québécois adopte la loi 78 qui met fin à la grève dans les universités, restreint le droit de manifester et prévoit de lourdes amendes pour les contrevenants.

20 mai 300 personnes sont interpellées lors d’une manifestation nocturne à Montréal.

21 mai La Classe (Coalition large de l’Association pour une solidarité syndicale étudiante) annonce qu’elle ne respectera pas la loi 78. Une majorité de citoyens se déclarent solidaires des étudiants en lutte

Appel de personnalités québécoises paru dans Le Devoir dénonçant la répression qui s’abat sur les étudiants en lutte depuis 8 mois contre l’augmentation des frais d’inscription Le gouvernement Charest a choisi de dénouer la grève étudiante sur les droits de scolarité par la manière forte, suite logique de sa gestion d’une crise qu’il n’a jamais comprise ni maîtrisée. Son scénario était mauvais et la conclusion de l’histoire ne peut qu’être lamentable. Nous la dénonçons. Les seuls mots qui peuvent qualifier la loi 78 adoptée le 18 mai par l’Assemblée nationale sont : abus de pouvoir. S’il fallait une loi pour assurer les conditions d’accès à l’enseignement, rien ne justifiait de suspendre les droits démocratiques fondamentaux de l’ensemble des citoyens québécois, tel le droit de manifester. Pourquoi un tel excès d’autorité ? On ne peut que remarquer que, dans l’histoire du Québec et du Canada, deux États démocratiques dotés de chartes des droits et libertés qu’on porte fièrement à la boutonnière, la tentation autoritaire est présente dès que la tension sociale croît. Elle est le corollaire de la peur engendrée par la faiblesse des autorités en place. Dans le cas présent, cette faiblesse a été démontrée par l’incapacité du gouvernement Charest à régler cette crise par le dialogue. Le mépris à l’égard des groupes étudiants, qui a fait obstacle à de saines négociations de toutes parts réclamées, s’articule aujourd’hui dans une loi porteuse d’arrogance et d’une volonté affirmée de casser une crise devenue hors de contrôle, alors qu’il s’agissait au départ d’un désaccord politique comme le Québec en a souvent connu. Pour les étudiants, cette loi est une “déclaration de guerre”. Pour les groupes sociaux, c’est l’occasion saisie par l’État pour miner des droits fondamentaux. La contestation juridique qui s’annonce sera vive. L’idée d’une pause dans cette escalade insoutenable, par suspension des cours, eût suffi. Mais non ! La dégaine est excessive : elle heurte de plein fouet des droits aussi cruciaux que ceux de l’expression et de la manifestation, bafouant la démocratie. Elle déborde du cadre habituel de la dissuasion avec des amendes outrancières–pour des étudiants qui dénoncent une hausse des droits [de scolarité] ! Elle menace l’existence des groupes étudiants, leur nie tout rapport de force par voie de grève en faisant du droit à l’éducation le principe suprême, écorchant du coup le droit d’association. Elle incite à la délation. Elle fait des dirigeants d’établissement des préfets de discipline. Elle exige des associations qu’elles mettent au pas leurs membres. Elle confère aux corps policiers des pouvoirs d’encadrement qui effacent, en définitive, la manifestation spontanée. Elle rend l’État omnipotent, lui conférant des pouvoirs exorbitants qui flirtent avec le déni de droit. Ses imprécisions et son arbitraire pourraient s’étendre à d’autres sphères. L’inquiétude et la méfiance se justifient pleinement. Que faire maintenant que cette loi est adoptée ? Elle est la loi et il faut la respecter. Mais la résistance est possible. Des recours existent. Il y a la voie des tribunaux, que prendront avec raison les associations étudiantes et les groupes de défense des droits. Il y a celle de l’opinion publique, qui aura à se prononcer lors de la prochaine élection. Le gouvernement voudra alors défendre sa décision de hausser les droits de scolarité universitaires, mais il lui faudra expliquer pourquoi il a laissé un conflit si prévisible dégénérer en crise et n’est intervenu que lorsqu’il était trop tard. Il y a une troisième voie, celle de la raison, que pourrait retrouver le gouvernement Charest une fois retombée la tension qui prévaut aujourd’hui. Négocier est toujours possible. Prendre cette voie et retirer la loi 78 montrerait que le Premier ministre, ses ministres et ses députés ne cherchent pas à instrumentaliser le droit à des fins politiques, mais que leur préoccupation première est la paix sociale.

GXC

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