Au début du mois, un événement inédit s’était déroulé dans les murs de l’Hôtel de Région à Ajaccio : des fonctionnaires de la Collectivité avaient investi l’assemblée pour y exprimer, sans retenue, les difficultés rencontrées dans l’exercice quotidien de leur profession. Trois semaines plus tard, les tensions semblent s’être apaisées et le dialogue a été rétabli avec la hiérarchie.
La session de l’Assemblée de Corse du 26 mai s’est ouverte dans un brouhaha inhabituel. Les élus territoriaux ont rejoint sous les applaudissements des agents de la Collectivité réunis dans le hall de l’hémicycle. Comme ils l’avaient annoncé, ils ont observé un débrayage de deux heures symboliquement. Dans une ambiance plutôt détendue même si tous les problèmes n’ont pas été résolus avec les signatures apposées en bas d’un protocole. Mais la tension qui était palpable quelques jours auparavant était retombée. Quelque 500 personnels, les traits tendus, avaient emprunté le 5 mai les fauteuils en cuir marron des élus territoriaux pour une assemblée général extraordinaire. L’occasion pour eux de dénoncer leurs nombreux griefs portant sur les conditions de travail, la précarité, la formation, les recrutements, les carrières, l’installation d’une pointeuse, les dérives managériales. Cette manifestation sans précédent du malaise social a abouti à une rencontre entre une délégation et le président du Conseil exécutif, Paul Giacobbi, le 18 mai.
Renouer le dialogue social
Un protocole d’accord a été défini puis acté, à la grande satisfaction des deux parties. Le directeur général des services, pourtant décrié en interne par un grand nombre de salariés, a même été conforté dans son poste. Pas de limogeage, ni de lynchage médiatique, juste un dialogue et des revendications. A l’issue de cette réunion, l’intersyndicale avait constaté que « le président (semblait) avoir pris en compte les divers points abordés » mais restait « vigilante et mobilisée quant à (l’) application » des points abordés « qui devra intervenir dans les meilleurs délais ». Lors d’une allocution au cours de la session, Paul Giacobbi s’est félicité d’avoir renoué le dialogue avec les personnels. « Nous avons débattu en toute franchise des difficultés rencontrées par les agents », a expliqué le président. Il s’est déclaré conscient de « l’impact des changements que nous imposons et qui nous sont imposé », reconnaissant que le changement de mandature était intervenu dans un contexte déjà tendu en raison du contexte national et régional. Avant que les questions orales ne débute, une représentante du personnel a lu un texte aux élus très attentifs dans lequel les agents mis en cause par l’ACA dans le cadre de l’obtention de subventions pour financer les travaux du stade ou par la justice dans l’affaire de marchés publics étaient assurés du soutien de leurs collègues. Dans son allocution, Paul Giacobbi a assuré que les procédures judiciaires visant certains agents n’auraient « aucune conséquence sur la confiance que nous avons et sur leur carrière ».
Confiance des dirigeants territoriaux
Le président de l’Assemblée a également tenu à évoquer ce conflit social qui a secoué l’instance régionale, menaçant de se propager aux offices et agences de la collectivité. « Nous partageons, élus comme agents, plusieurs valeurs fondamentales qui, en dehors de toute autre considération, devraient suffire à nous réunir », a-t-il énoncé, confiant être « satisfait de voir le dialogue social avancer dans un sens constructif ». Soulignant que élus et agents travaillaient « tous pour le service public et l’intérêt général », et étaient « confrontés au même défi : celui de conserver une vision globale afin de concilier les contradictions d’un territoire, et apporter des réponses satisfaisantes », il a déclaré avoir constaté que « la crise (avait) exacerbé les attentes des citoyens envers les collectivités publiques ». Les dirigeants de la Collectivité ont conscience que des crispations persistantes pourraient affecter notablement le fonctionnement général de l’institution. Avec une mandature courte et des dossiers emblématiques pour le développement de la Corse à construire, il n’est pas question de laisser le moindre grain de sable gripper la machine.
M.K