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La sécurité et nous

jeudi 23 août 2012, par Journal de la Corse

Paraphrasant le manifeste du parti communiste, on pourrait écrire qu’un spectre hante le vieux monde, celui de la sécurité : sécurité antiterroriste, sécurité de l’emploi etc. Manuel Valls, le nouveau ministre de l’intérieur, vient de démontrer que de droite ou de gauche, les premiers flics de France possèdent toujours la même vision mutilée de la délinquance : des méfaits qui doivent être punis sans que le volet prévention apparaisse réellement. Ainsi, Valls vient-il d’annoncer la création de nouvelles zones de sécurité prioritaires où des « actions de sécurité renforcées » seront menées dès septembre avant une possible extension du dispositif d’ici 2013.

Un discours musclé

Manuel Valls aurait pu être le ministre de l’intérieur de Nicolas Sarkozy. On aurait pu croire que ses premières actions auraient été de restaurer la police de proximité supprimée par le précédent président de la République. Ou encore de relier la hausse de la délinquance à la crise économique, mariant habilement les indispensables mesures de répression à une tentative d’amélioration de conditions de vie dans les endroits les plus "criminogènes". Eh bien, non ! Manuel Valls veut réprimer. Il a dessiné sur le papier 15 zones tests qui feront l’objet d’« actions de sécurité renforcées » le tout accompagné d’une explication martiale. « L’idée, c’est de mettre le paquet là où il faut, pour ce qu’il faut, avec souplesse, adaptation". Ça voudrait tout dire et ça ne dit pas grand-chose.

Des territoires hétéroclites

Les zones sont dispersées sur le territoire national tout entier de Lille à la Guyanne. Certains quartiers de Paris ou de la proche banlieue font partie de ce maillage hétéroclite sans que l’on comprenne très bien la cohérence du projet. L’objectif serait de cibler l’économie souterraine alors qu’il suffirait de relever les signes extérieurs de richesse et de s’interroger sur leur origine. Comment se fait-il qu’à Montreuil tel chômeur professionnel possède un porche Cayenne ? Comment expliquer l’achat d’un grand appartement dans Paris par un homme au RSA etc. Le reste du projet appartient à un monde administratif qui en général gêne les enquêtes plutôt qu’il ne les sert. Ainsi les préfets des 15 zones tests auront pour première mission de définir des contours précis des zones et d’y fixer quelques objectifs de sécurité (deux ou trois). "En fonction de l’évolution de la délinquance, ce périmètre pourra être modifié afin de s’adapter localement à la réalité du terrain. Une cellule opérationnelle dirigée par le préfet, qui pourra être associé au procureur de la République s’il le souhaite, aura pour charge de coordonner les actions policières. Le fisc et différents services en charge de la répression de fraudes diverses pourront également y être associés." Bref tout tremble et le risque est que rien ne bouge.

Et la Corse ?

Très curieusement la Corse, régulièrement mise en exergue par les autorités et certain(e)s journalistes en mal de sujets, ne figure pas dans les zones à risques. Qu’est-ce à dire ? Nous ne serions plus cette partie extérieure du territoire nationale qui produit du banditisme en veux-tu en voilà ? Mais qu’est-ce qui justifie alors les menées (sans grand résultat il est vrai) de la justice d’exception telle que la JIRS. C’est à ne rien n’y comprendre. Mais ne nous plaignons pas ! Pour une fois que nous ne figurons pas au palmarès des lieux-voyous, réjouissons-nous. Le vrai problème du projet Valls est qu’il oublie tout simplement le volet prévention. Il risque donc d’être aussi inefficace que toutes les précédentes usines à gaz concoctées par les précédents ministres de l’intérieur. Mais surtout il tourne le dos aux valeurs de gauche qui tendaient à reconnaître que la délinquance, si elle doit être réprimée possède d’autres sources que la méchanceté des individus.

GXC

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