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L’invité Pierre Mattei

jeudi 1er décembre 2011, par Journal de la Corse

Le choix de l’assemblée de Corse sur le système à adopter pour ce qui est de la délégation de service public aux transports maritimes sera essentiel non seulement pour le développement de ces transports mais aussi et surtout pour celui du tourisme que les Corses appellent de leurs vœux. Ils se sont rendus compte en effet que la principale ressource de l’île a trouvé ses racines et sa force dans un meilleur aménagement de ces transports qui a permis aux vacanciers d’atteindre la destination Corse sans trop grever leur budget vacances. Mieux les aménager encore serait de nature à augmenter leur nombre et par là même donner au tourisme insulaire une plus grande assise. Les idées de Pierre Mattei sur le sujet sont à retenir.

Le fait que la Cour administrative d’appel ait donné raison à Corsica Ferries en annulant la DSP peut-il laisser espérer un avenir de justice pour votre compagnie ou faut-il croire qu’il ne s’agit-là que d’un simple avertissement à l’OTC ?

L’arrêt de la cour est très clair sur deux points qui représentaient une concurrence déloyale à l’encontre de Corsica ferries : En premier lieu on ne peut financer des services, avec des subventions, que lorsqu’il y a carence de l’initiative privée. Dans le domaine du service de pointe, c’est-à-dire le transport de touristes en été, il n’y a aucune carence d’offre, c’est même l’inverse. En second lieu, on ne peut maquiller les réponses à l’appel d’offre en faisant apparaitre des demandes plus faibles pour, après, se faire compenser la différence à la fin de chaque année par des subventions supplémentaires. C’est condamnable et ça a fait exploser le budget de l’Office des transports. Ces deux points représentaient ce qui nous gênait le plus dans le système depuis 2001, nous n’avons cessé de le dénoncer, on nous donne enfin raison. Le comble c’est que cela fera faire des économies substantielles sur l’enveloppe de continuité territoriale !

Vous avez dit que l’aide sociale était de nature à « booster » le trafic maritime. Est-elle suffisante pour surmonter tous les obstacles qui ont tendance à le réduire ?

Au moins nécessaire ! La preuve n’est plus à faire, les chiffres parlent d’eux mêmes : 1.5 millions de passagers en plus grâce à une baisse des tarifs directement répercutée en faveur des passagers. Depuis 10 ans, 95% des passagers supplémentaires sur le bord à bord et tous moyens de transport confondus, ont été transportés par Corsica Ferries. Ce sont les chiffres officiels.

Cette baisse du trafic correspond à une baisse de la fréquentation ce qui fait planer un voile de morosité sur la saison 2011. Elle n’a pas été cependant catastrophique pour votre compagnie laquelle a finalement réussi à tirer son épingle du jeu en fin de saison. Mais n’est-il pas temps de revoir la politique des transports pour éviter d’autres déconvenues ?

L’assemblée de Corse doit répondre à une question essentielle : la continuité territoriale a-t-elle vocation à abaisser les coûts de transport pour les touristes qui viennent chez nous ? Si la réponse est non, tout est à revoir y compris dans l’aérien. Si la réponse est oui, nous disons qu’un système ouvert, bénéficiant exclusivement aux passagers en les aidant directement- et pas celui qui les transporte- est une incitation à venir en Corse pour les touristes et à être performant pour les compagnies qui se concurrencent tout en « boostant » le trafic. En ce qui concerne la saison 2011, nous sommes satisfaits parce que nous avons légèrement baissé en haute saison mais fortement progressé avant et après. C’est préférable pour tous car l’étalement est une des clés d’une meilleure acceptation du tourisme par les Corses et le garant d’une plus grande contribution du tourisme à l’économie locale.

Et vous-même n’avez-vous prévu de mettre en œuvre d’autres moyens pour les éviter ?

Nous n’avons que nos propres ressources et notre stratégie à notre disposition pour éviter les déconvenues. Les marchés sont devenus extrêmement volatils et nous devons en conséquence cultiver la flexibilité et la réactivité. Ce qui est nécessaire aujourd’hui, c’est de donner de la visibilité et de la stabilité sur la continuité territoriale aux opérateurs qui ont déjà fort à faire avec un environnement totalement imprévisible.

Que peut-on attendre de la Collectivité Territoriale ? De nouvelles dispositions qui puissent donner à la Délégation de service public sa véritable vocation ? Ou un statu quo régressif ?

Pour nous il faut que, très vite, la CTC décide du cahier des charges, de l’appel d’offre et du système, s’il doit y en avoir un, qui permettra d’abaisser les tarifs pour les touristes. Ensuite il faut lancer un appel d’offre pour ce qui sera en DSP et l’attribuer, là aussi, le plus vite possible dans un cadre ouvert et concurrentiel. En effet des délais trop courts entre l’attribution du marché et la mise en place des navires de la nouvelle DSP sont une faveur aux sortants, cela a été jugé plusieurs fois. Pour le reste, une fois que les règles seront claires pour tous, chaque compagnie pourra enfin s’y adapter, programmer son développement et il y aura de la place pour tous.

(Interview réalisée par Jean-Noël Colonna)

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