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L’invité:Paul-Marie Bartoli, président de l’Office des Transports et conseiller exécutif de Corse

jeudi 5 avril 2012, par Journal de la Corse

Le dossier, particulièrement brûlant, des dessertes maritimes et aériennes fait, depuis plusieurs semaines, couler beaucoup d’encre. Même si des accords ont été trouvés, la situation reste tendue dans l’aérien comme dans le maritime. Paul-Marie Bartoli, président de l’Office des Transports et conseiller exécutif de Corse livre son analyse sur ces deux dossiers.

Que pensez-vous de la proposition de Gérard Couturier, président du conseil de surveillance de la SNCM ?

Sur la méthode, elle a déjà de quoi surprendre. En effet, nous avons eu connaissance de la lettre de Gérard Couturier en même temps que les médias. Sur le fond, nous pouvons nous interroger sur l’estime portée par Veolia à l’égard de la SNCM et de ses employés. Ne nous illusionnons pas, l’euro symbolique ne couvrira pas les charges et les dettes de la compagnie. La Collectivité même si elle en avait la volonté n’a pas les moyens de prendre en charge un tel passif. Il convient au contraire pour Veolia de promouvoir un vrai projet de développement de la SNCM comme elle s’y était engagée initialement.

On évoque, en guise de solutions, la création d’une compagnie maritime régionale. Qu’en pensez-vous ? Comment la mettre en place ? Sur quelles bases ?

La compagnie régionale est une des pistes pour assurer une desserte de la Corse conforme à nos besoins. Il reste à trouver la structure juridique adaptée. La société d’économie mixte est souvent évoquée. Cependant, il faut connaître les autres actionnaires, leur volonté de s’y investir, le coût, définir le fonctionnement. Une telle organisation ne s’improvise pas, d’autant que cette compagnie sera soumise à la concurrence. C’est pourquoi l’Assemblée de Corse a adopté lors du débat des 22 et 23 mars, une délibération qui décide la mise en place d’une commission spéciale composée de membres de l’Assemblée de Corse, du Conseil Economique, Social et Culturel, de personnes ressources (universitaires, juristes, économistes…) et de moyens matériels et financiers. La mission de cette commission sera d’étudier d’une part, la faisabilité de toute structure à caractère public ayant pour activité l’exploitation de services maritimes et, d’autre part, les modalités de sa mise en œuvre.

Paul Giacobbi, président de l’exécutif a évoqué, concernant la SNCM, la nécessité de sauvegarder l’emploi. Comment ?

La SNCM doit présenter un projet de développement conforme à son objet social. Ces dirigeants ont à s’ouvrir sur de nouveaux marchés, être plus dynamiques commercialement. Il n’est plus possible de se tourner systématiquement vers la CTC et l’Office des transports de la Corse pour obtenir des ressources supplémentaires.

Quel sera le visage de la prochaine desserte maritime ?

Une étude a été réalisée dans le but de déterminer les besoins de desserte maritime des résidents corses afin de garantir la continuité territoriale conformément aux exigences de l’article L. 4424-18 du Code Général des Collectivités Territoriales. Cette étude identifie les besoins des résidents corses sur la base de la structure actuelle du marché concurrentiel et la carence du secteur concurrentiel qui pourrait être comblée par un service public de desserte maritime mis en place par la CTC. Les caractéristiques du futur périmètre du service public de desserte maritime dont les modalités d’organisation relèvent de la CTC sont les suivantes :

Liaison entre la Corse et Marseille.

Capacité minimale passagers : 410 000 passagers annuels soit 34000 passagers mensuels.

Capacité minimale fret future DSP : 1 600 000 mètres linéaires annuels.

Fréquences hebdomadaires : 23 rotations soit 46 traversées.

7 jours /7 : Ajaccio 7 jours /7 : Bastia 3 jours/7 : Balagne 3 jours /7 : Porto-Vecchio 3 jours/7 : Propriano

Ces éléments seront précisés dans le cahier des charges qui sera soumis au vote de l’Assemblée, pour répondre à une demande légitime des conseillers territoriaux.

Vous avez annoncé un ensemble de mesures (fin du service complémentaire, absence de DSP sur Toulon). Quelle en est la finalité ?

Nous entendons nous recentrer sur les fondamentaux de la continuité territoriale. Aussi, le port de Marseille constitue pour le fret et les résidents corses, le point de contact sur le continent. L’économie de la zone y est essentielle, tout comme les relais ferroviaires depuis la gare Saint-Charles. La plupart des Corses vont se faire soigner dans les hôpitaux marseillais. La dotation de continuité territoriale versée par l’Etat est gelée depuis 2009 ; nous considérons, donc, que la continuité territoriale doit concerner les Corses et leur économie. Nous ne pouvons pas nous disperser.

Venons-en à la desserte aérienne. Quelles sont ses perspectives, à court terme ?

Il faut souligner en premier lieu que la desserte dite du bord à bord a été confiée à Air Corsica en s’appuyant sur une convention renouvelée, suivant les recommandations de la Chambre régionale des comptes de Corse. Le coût est moindre (- 500 000 euros) pour une offre largement renforcée. L’évolution de tarif résident est établie selon une méthodologie objective et transparente. Le dispositif de contrôle est complété et cohérent. Nous pouvons être satisfaits de cette négociation. En ce qui concerne la desserte Paris Orly-Corse, les aéroports de Calvi et de Figari seront desservis par Air Corsica sur la base de conventions proches de celles du bord à bord. Les discussions avec Air France se sont conclues mi-mars. L’Assemblée de Corse a autorisé, à cet effet, le président Giacobbi à signer les conventions lors de la session des 22 et 23mars. Nous entendons désormais qu’Air France assure le service public comme il s’y est engagé.

Vous vous êtes élevés contre la hausse du tarif résident préconisée par Air France. Où en est le bras de fer, aujourd’hui ?

Le tarif résident doit rester moindre en raison de la spécificité des insulaires, comme la jurisprudence française et européenne le permet. Toutefois, entre le moment où nous avons rédigé les obligations de service public et aujourd’hui, le cours du carburant a considérablement augmenté, de même que le taux de TVA. Par ailleurs, des charges supplémentaires s’imposent aux compagnies, il est donc normal de faire évoluer le prix du passage sur des bases transparentes et objectives comme nous l’avons fait sur le bord à bord. J’insiste sur le fait que la CTC doit maîtriser l’évolution de ce tarif.

Air France menacerait de quitter la destination corse, qu’elle estime peu rentable. Qu’en pensez-vous ? Après plusieurs semaines de rapport de force un accord a finalement été trouvé avec la compagnie. Qu’en est-il ?

Comment peut-on croire qu’Air France quitte une destination comme la Corse, surtout l’été ? Dans le cadre des négociations, la CTC a accepté de prendre en charge le coût supplémentaire occasionné par les nouvelles obligations de service public qui se traduisent par un renforcement de la desserte, soit 3 millions d’euros par an. De plus, nous participons à hauteur de 8 millions d’euros par an aux charges d’exploitation. Il me semble que nous avons accompli l’effort nécessaire.

Quel est votre sentiment sur l’affaire des "Indignés" ? Comment éviter que cela se reproduise à l’avenir ?

J’ai un principe simple : le droit du travail doit être respecté. Chacun de se conformer à la décision de la cour d’appel de Bastia. Sur l’avenir, j’insiste, toutefois, sur la nécessité du dialogue social au sein de l’entreprise.

Un changement de gouvernement lors des élections présidentielles pourrait-il, selon vous, influer sur la politique de transports en Corse ?

Je l’espère et j’y aspire.

Interview réalisée par Joseph Albertini

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