L’Éducation nationale a toujours été vivement critiquée : accusée d’immobilisme, de rigidité, de ne pas former conformément aux besoins et à la réalité du terrain, de ne pas être assez performante…Tiraillée entre la massification de l’éducation, les difficultés du marché de l’emploi et les exigences de rentabilité, l’école est plus que jamais attendue au tournant. Entre réformes multiples à tous les niveaux scolaires, les cartes scolaires, les suppressions de postes d’enseignants, les modifications des programmes des enseignants, les lacunes du recrutement des professeurs, l’école n’en finit pas de s’interroger et de muter.
État des lieux
Depuis les lois scolaires de 1881-82 de Jules Ferry, l’école est laïque, gratuite et obligatoire, de 6 à 16 ans depuis 1959, que ce soit dans un établissement privé ou public. Les effectifs totaux d’élèves et d’étudiants atteignent 15 millions, soit un quart de la population. Le coût de l’éducation représente 6,6% du PIB de la France en 2008, dont 54,1% dépendent du ministère de l’Éducation nationale en 2008. L’école est d’abord un lieu de transmission de savoir, or aujourd’hui, la montée de la violence à l’école et les nouvelles méthodes d’enseignement fondées sur la prise en compte de l’autonomie individuelle, moins contraignantes, avec une disparation de la notion de culture générale (même le concours de Sciences politiques a supprimé cette épreuve, objet de nombreux débats), tendent à niveler le niveau vers le bas. Selon le programme PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) de comparaison des systèmes éducatifs nationaux, les résultats du système éducatif français sont en recul par rapport aux autres États membres de l’OCDE. En 2008, selon l’INSEE, 69,2% des Français possèdent un diplôme égal ou inférieur au bac en France et 19,9% seulement sont titulaires d’un diplôme supérieur au baccalauréat. La succession de réformes est aussi contestée, que cela soit au niveau du contenu des cours, ou sur la formation des enseignants (l’IUFM apparaît, puis disparaît en étant rattaché à une université. Celui de Corte a été intégré à l’Université de Corse le 1er janvier 2009.), tout rend l’ensemble très confus, avec pour conséquences une révolution culturelle au niveau des enseignants, une explosion scolaire (depuis 1950, le supérieur a été multiplié par 10, le secondaire par 6) et une augmentation des échecs scolaires : 1/4 à 1/5ème des enfants entrent en 6ème sans savoir lire ; 60% des lycéens ne sont pas à leur place ; 100.000 jeunes sortent sans formation de l’école ; dans l’enseignement supérieur, sur 632.000 étudiants inscrits en deug, plus de 40% ne vont pas au terme du diplôme, ou l’obtiennent après 4 ou 5 ans de faculté. En conclusion, le système éducatif français est en perte de vitesse, malgré la réussite de la démocratisation de l’accès à l’école, on est encore loin de l’idéal de la plus grande égalité des chances.
La carte scolaire en questions
La récente mobilisation des parents, élus et corps enseignant contre la nouvelle carte scolaire proposée en Corse montre combien le devenir de l’école de la République intéresse tout le monde. La question des moyens alloués aux écoles pour assurer leur mission éducative ne cesse de diviser. Dans un contexte de rigueur, les économies sont réalisées à toutes les échelles, y compris sur l’éducation. Ainsi, les suppressions de postes se poursuivent, dans l’Éducation nationale aussi. Au détriment des écoles rurales et des soutiens aux élèves en difficulté, des coups durs pour le réseau de Rased (réseau d’aides spécialisées pour les élèves en difficulté). Comment lutter contre l’échec scolaire et la désertification des villages avec ces nouvelles coupes dans les ressources ? En Haute-Corse, en 6 ans, il y a eu 1.000 élèves gagnés et 50 postes perdus. Une équation qui passe mal. En Corse-du-Sud, le bilan est similaire, avec toujours une volonté de définir une carte scolaire répondant à la fois aux contraintes budgétaires et aux priorités de l’académie. Traduire une politique éducative qui prend en compte la rentabilité dans ses schémas c’est faire du système éducatif une « vaste entreprise de formation de capital humain ». Le jeu des ouvertures/fermetures des classes est un événement particulier pour les académies, nettement moins festif que la cérémonie des Oscar, sans statuette à la clé, la carte scolaire étant le fruit de trois mois de travail. Pour la rentrée 2012, l’académie de Corse se voit amputée de 16 postes d’enseignant. La course à la compétitivité dans l’école, amputée de ses principaux acteurs, risque d’être tronquée.
Maria Mariana