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Front de gauche : des militants sans complexe

jeudi 20 octobre 2011, par Journal de la Corse

Les militants du Front de gauche affichent des idées de rupture et des concepts comme la lutte des classes dont le « politiquement correct » croyait avoir définitivement triomphé.

Ambiance conviviale, apéritif et banquet républicain lors de la 52ème édition de la Fête de Terre Corse, le bulletin mensuel d’information du Parti Communiste dans l’île. Cet événement avait lieu au Théâtre de Bastia le week-end dernier (15 et 16 octobre). Le caractère festif de ce rendez-vous n’a cependant pas fait oublier aux participants qu’ils étaient présents pour débattre à partir de thèmes politiques locaux et nationaux. Il était aussi l’occasion de remobiliser les troupes sur tous les fronts après des résultats plus que satisfaisants lors des dernières territoriales et dans la perspective des scrutins de 2012. Le samedi a été dominé par la question sociale. Après la projection d’un documentaire dénonçant les pratiques peu reluisantes des compagnies low cost, des syndicalistes et Michel Stefani, conseiller territorial Front de gauche (Parti communiste, Parti de gauche), ont mis l’accent sur les mutations profondes de la société que pouvait révéler une politique des transports libérale. Ils ont en particulier souligné la régression sociale pour les salariés concernés et la dégradation du service à l’usager que ferait peser une concurrence fondée sur le dumping social et la différenciation par le prix le plus bas, ainsi que sur un démantèlement du service public au nom de la profitabilité d’opérateurs privés et de la réduction des dépenses publiques. Ce débat a par ailleurs confirmé que le Conseil exécutif et au-delà la majorité territoriale de gauche, devraient « ramer » pour dégager en leur sein des solutions consensuelles concernant les délégations de service public de l’aérien, du maritime et du ferroviaire. Il est en effet apparu que les intervenants étaient décidés à maintenir la primauté de la solidarité nationale et de l’intérêt général, et étaient plus que réservés concernant des évolutions telles que la création d’opérateurs régionaux, la réduction de destinations ou une plus grande place faite au secteur privé.

Hommage au travail accompli

Le dimanche matin a été consacré à un premier bilan de la majorité territoriale de gauche. (Quels changements sont intervenus après 18 mois de pouvoir de la nouvelle majorité régionale ?). Intervenant en tant que président de l’Assemblée de Corse, Dominique Bucchini a balayé les critiques de la droite et des nationalistes, rappelé les difficultés rencontrées et loué le travail accompli, tout en admettant que le bilan pouvait apparaître contrasté. Après avoir souligné que le Front de gauche n’avait jamais prétendu ou promis que tout serait réglé en 18 mois, et après avoir indiqué qu’il fallait compter avec le désengagement humain et financier de l’Etat, il a rejeté les accusations d’immobilisme et fait part des avancées réalisées. En premier lieu, il a mis en exergue la réussite des Assises du foncier qui ont permis de dégager des axes d’action en matière de logement social et un large consensus contre la spéculation foncière. Il a aussi évoqué les mesures concrètes prises en faveur de l’économie sociale et solidaire, ainsi que la décision de mettre en place l’Observatoire des prix et l’Agence foncière. Enfin, il a précisé que l’action économique, et plus particulièrement l’aide aux entreprises, était désormais accompagnée d’une exigence de contreparties sociales. En revanche, il a reconnu qu’il restait beaucoup à faire et que certains dossiers comme les transports se révélaient ardus à traiter. Il importe aussi de noter que Dominique Bucchini a salué l’action de la conseillère exécutive Maria Giudicelli et celle des conseillers de Corse Front de gauche. Il a en effet considéré qu’ils honoraient les engagements pris auprès des électeurs.

Retour de la lutte des classes

Le dimanche après-midi, le temps du débat a été consacré aux enjeux nationaux. Les participants sont intervenus à partir d’un document prospectif intitulé « L’humain d’abord » et des propositions que défendront Jean-Luc Mélenchon et le Front de Gauche lors des élections présidentielles et législatives. Introduit par une représentante du Conseil national du Parti communiste, le débat s’est avéré très riche. Il a d’abord permis de vérifier une combattivité d’évidence insufflée par le bon résultat du Front de gauche lors du scrutin territorial de mars 2010. Les nombreux intervenants ont en effet montré qu’ils abordaient avec confiance ces échéances électorales et avaient l’ambition de porter ensemble un véritable projet politique alternatif. Ils ont aussi relevé que si les Primaires citoyennes organisées par le Parti socialiste avaient pour vertu de permettre une expression populaire et de médiatiser des problématiques comme la « Démondialisation », elles avaient aussi montré qu’au contraire du Front de gauche, les socialistes ne voulaient pas rompre avec la loi du marché. Les intervenants ont également mis l’accent sur la nécessité pour le Front de gauche de mobiliser les citoyens sur le rejet de la Règle d’or (inscrire dans la Constitution une limitation de la dette), ainsi que sur le refus d’une intercommunalité passant d’un objectif de projets à un objectif de services et pouvant aboutir à la suppression de milliers de communes et de dizaines de milliers de conseillers municipaux s’engageant à titre bénévole au service de leurs concitoyens. On retiendra enfin que le débat a permis de constater que les militants présents affichaient sans complexe des idées de rupture et des concepts comme la lutte des classes dont le « politiquement correct » croyait avoir définitivement triomphé.

Pierre Corsi

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