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Elus et citoyens : le vent est au divorce

jeudi 29 septembre 2011, par Journal de la Corse

Au sombre bilan éthique et moral d’élus connus et influents, s’ajoutent les échecs de bien d’autres dans la gestion des responsabilités publiques. Les administrés en ont conscience.

Ces derniers temps, la classe politique ne contribue guère à donner une image positive d’elle-même. L’actualité est marquée d’événements révélant que plusieurs élus de droite et de gauche sont peu recommandables aux plans éthique et moral. Elle montre aussi que trop d’élus sont peu performants dans l’exercice de leurs mandats. Ainsi, l’affaire DSK qui défraie la chronique donne à voir un comportement peu compatible avec l’exercice de hautes fonctions, car le mode de vie d’une personnalité aspirant à gouverner un pays ne peut être celui d’un citoyen ordinaire. En effet, sans porter de jugement sur l’éthique personnelle ou la moralité de qui était considéré comme le favori du prochain scrutin présidentiel, il est permis de s’interroger sur l’adéquation pouvant exister entre des mœurs exposant au scandale et au chantage, et l’ambition d’accéder à une fonction élective exigeant une totale liberté d’appréciation dans la prise de décision et une imperméabilité aux pressions. Ainsi également, les soupçons de corruption, de trafic d’influence et de favoritisme à grande échelle entachant le conseil général des Bouches du Rhône, ont de quoi irriter des administrés auxquels ont demande toujours plus d’efforts au plan fiscal et de sacrifices au plan social (fin de la retraite à 60 ans, réduction de la protection sociale…) Enfin les affaires Takiedinne et Bourgi ne sont pas de nature à redorer le blason de quelques hauts personnages auxquels vous ou moi avons accordé notre confiance en exerçant notre devoir électoral. En effet, à peine l’affaire Clearstream terminée et alors que l’on enterre en douceur les épisodes peu glorieux de la gestion chiraquienne de la ville de Paris, des langues se délient pour indiquer que les campagnes électorales présidentielles sont financées sous le manteau par des porteurs de valises remplies de billets de banque. Pire, il semble avéré qu’une bonne partie de l’argent provient de pays étrangers dont certains sont gouvernés par des dictateurs ou des brigands. A ce sombre bilan éthique et moral d’élus connus et influents, il convient d’ajouter les échecs de bien d’autres dans la gestion des responsabilités publiques. Ainsi, au plan national, le pouvoir en place semble incapable d’apporter des solutions au creusement des déficits publics, à l’insuffisance de croissance économique, au chômage, à la précarité, à l’insécurité, aux atteintes répétées à la cohésion sociale. Au plan local, une partie du personnel politique peine à prendre en compte la crise économique et financière, la réduction des dotations de l’Etat et la nécessité de ne plus accroitre la pression fiscale. Au contraire, trop de collectivités locales se refusent à réduire la voilure des dépenses. Elles continuent de se doter d’équipements aussi coûteux à construire qu’à gérer. Elles recrutent plus que de raison. Elles subventionnent trop d’associations sportives ou autres dont les aptitudes au lobbying l’emportent de beaucoup sur les résultats concrets en matière de cohésion sociale ou de démocratisation des activités. Elles ne font rien pour réduire leur endettement.

Les élus locaux sont aussi touchés.

A quelques mois du scrutin présidentiel, cette situation contribue fortement à la dégradation du climat politique. Elle apporte de l’eau au moulin des mécontents et du populisme. Elle rend aussi de plus en plus séduisants et attractifs les discours qui, à gauche ou à droite, préconisent des ruptures. La perte par la droite de la majorité au Sénat ne fait que confirmer cette évolution. En effet, il apparaît, que traditionnellement favorables à des candidats modérés ou à des notables, de nombreux grands électeurs fleurant très fort la « France profonde » ont osé accorder leurs suffrages à des candidats de gauche pourtant réputés partisans. D’ailleurs, même avant que survienne la récente rafale « d’affaires », on pouvait déjà relever une hostilité ou une perte de confiance des Français à l’encontre des élus. Avant les dernières élections cantonales (mars 2011), le baromètre du Centre de recherche politique de Sciences Po (Cevipof) indiquait que la confiance des Français dans les politiques continuait de reculer, y compris aux dépends des maires. Il apparaissait que 83% des sondés estimaient que les hommes politiques ne se préoccupaient pas de ce que pense la population. En 2010, lors de la première enquête de ce type, ils n’étaient que 81% à exprimer leur défiance, Traditionnellement épargnés, les élus locaux étaient aussi touchés. Les personnes sondées n’étaient que 52% à déclarer avoir confiance dans leurs élus locaux, contre 65% il y a un an et, plus généralement, 57% des personnes interrogées estimaient que la démocratie en France « ne fonctionne pas très bien » ou « pas bien du tout », contre 48% un an plus tôt. De plus, cette défiance dépassait les clivages politiques puisque 56% des sondés déclaraient n’avoir confiance ni dans la droite ni dans la gauche pour gouverner le pays. « On va dans une politisation négative, c’est-à-dire une politisation assez forte qui va de pair avec une défiance à l’égard des politiques, d’où un espace ouvert pour le populisme » a commenté le directeur du Cevipof, se voyant renforcé dans son appréciation par le constat que la tentation du repli sur soi gagne du terrain (59 % des sondés,+ 10 points par rapport à 25010, ont déclaré qu’il « y a trop d’immigrés » en France et 40 % de ces mêmes sondés, + 10 points, ont affirmé que le pays « doit se protéger davantage du monde d’aujourd’hui ». De quoi donner renforcer la confiance de deux qui, chez nous et ailleurs, militent pour une affirmation plus forte des identités nationales ou locales et rejettent la mondialisation libérale des échanges économiques, commerciaux et financiers.

Pierre Corsi

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