Pauvre monde que celui où le ballon rond compte davantage que le ventre enflé des enfants qui ont faim. Pauvre monde dont nous sommes aussi acteurs
Grande et belle nouvelle ! Après avoir fouillé au fond de ses poches, la Commission européenne a décidé d’augmenter son aide financière destinée aux victimes de la sécheresse et de la famine dans la Corne de l’Afrique. Kristalina Georgieva, la commissaire chargée de la Coopération internationale, a annoncé que la Commission Européenne aidera les populations de cette région en débloquant 28 millions d’euros qui s’ajouteront aux 70 millions d’euros déjà affectés en 2011. Des Etats de l’Union Européenne ont promis de consentir eux aussi un effort. Kristalina Georgieva a ajouté qu’elle tenterait de réunir 60 millions d’euros supplémentaires « pour alléger les souffrances de tous ces gens ». Ce qui porterait la contribution de la Commission Européenne à environ 158 millions d’euros. Mieux vaut tard que jamais. Mais que de temps perdu alors que le pire était prévisible et annoncé. Des années de conflits en Somalie et en Ethiopie ont provoqué une disparition de la décision politique en matière de gestion de l’eau, de l’agriculture et des stocks alimentaires. Les chefs de guerre fragilisent l’aide humanitaire, s’y opposent ou s’en emparent. Les Nations unies ont fait savoir depuis longtemps que la sécheresse sévissait et que la famine menaçait. Cela fait des mois que les ONG alertent les gouvernements sur la dégradation de la situation des populations. Depuis des semaines, la faim jette sur les routes des centaines de milliers d’adultes et d’enfants originaires de Somalie, du nord du Kenya et du sud de l’Ethiopie. Avec ce qui reste de leur bétail et de leurs animaux de trait, ils se rendent dans des camps de réfugiés déjà surpeuplés.
82 millions d’euros pour le PSG !
Sur le terrain, organisé par le Programme Alimentaire Mondial, un pont aérien a démarré durant les derniers jours de juillet. Il doit apporter une aide alimentaire d’urgence aux Somaliens les plus en difficulté. Mais, cela reste une goutte d’eau dans la mer. Selon le secrétaire général de l’ONU, 1,6 milliard de dollars sont nécessaires rien que pour la Somalie. Or, fin juillet, seule moitié de la somme était disponible et la communauté internationale tarde à chiffrer le montant de son aide. Pour sa part, selon le ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire, la France aurait « doublé son aide » en la portant à 10 millions d’euros. Ce chiffre et d’autres en apprennent beaucoup sur l’état éthique de notre bas monde. Par exemple, ces derniers jours, nous avons pu apprendre que des financiers du Qatar avaient déboursé plus de 40 M€ pour renforcer l’équipe professionnelle de football du Paris Saint-Germain et envisageaient de signer un chèque de 40 M€ pour recruter un certain Pastor, meneur de jeu argentin qui évoluait à Palerme durant la saison 2010 / 2011. Après le transfert du dénommé Pastor qui devrait percevoir un salaire annuel de 4,5 millions d’euros, les Qatari auront donc dépensé 82 millions d’euros. Ce qui dépasse de loin les 60 millions supplémentaires que tente de rassembler Mme Kristalina Georgieva. Pauvre monde que celui où le ballon rond compte davantage que le ventre enflé des enfants qui ont faim. Pauvre monde dont nous sommes aussi, certes à un modeste niveau, les acteurs car, dans notre Ile, la survie d’un club de football et les insignifiantes péripéties de la construction d’un stade, suscitent davantage d’émotion et de mobilisation que l’état de pauvreté dans lequel se trouve plongé plus de 25 % de la population.
Alexandra Sereni